je vous demande de soutenir ces jeunes qui travaillent, durement et efficacement, car son pain c'est du Poilâsne à l'état rural.
MERCI AMELIE ET COURAGE !!
Un drôle de pétrin OU le pain d'une campagne

> Le coup est rude : si Elodie vend son pain sur les marchés de Saint-Vivien-de-Médoc, Lesparre-Médoc et Vendays-Montalivet, celui de Soulac pèse lourd dans son activité, surtout l'été. Mais la jeune femme est une battante. Qui plus est, elle est certaine que la décision de la commission est infondée, qu'il y a « un manque d'information ». Dans le doute, elle est retournée vendre son pain sur l'étal de ses parents, sans imaginer créer le mini scandale du 10 mars.

Au début de l'été 2006, elle a pris soin de présenter son projet et son pain au domicile de Xavier Pintat. Elle a même rencontré Jean-François Saubesty, seul boulanger présent sur le marché soulacais de Pâques à octobre. Ce dernier lui a proposé de vendre son pain bio sur son étal. Elle a décliné l'offre, préférant maîtriser toute la filière, de la fabrication à la commercialisation. Ils ont néanmoins trouvé un arrangement oral : lui est présent sur le marché le matin, elle l'après-midi.
Aujourd'hui, quelques commerçants lui reprochent d'avoir voulu « passer en force ». La plupart refusent de commenter l'affaire, tandis que circule en nord Médoc une pétition de soutien à la famille Aubert. Ses partisans estiment que son pain est un bon produit d'appel sur un marché quelque peu assoupi en hiver, que certains commerçants établis devraient se remettre en cause plutôt que de jouer de leur influence pour éloigner la petite nouvelle, que « ce n'est pas la première ni la dernière fois qu'une petite jeune qui vient avec des idées et de bons produits se fait éjecter ». Chacun défend son pré carré et il est sans doute plus difficile de s'opposer à une grande surface ou à l'installation d'un point chaud.
> Car il faut resituer le sujet dans un contexte plus large de concurrence dans le métier de la boulange. Une concurrence qui se ferait surtout ressentir l'hiver à Soulac, où l'on compte deux boulangeries traditionnelles, un point chaud (achat de pâtes congelées), deux dépôts de pain du boulanger Ferrer, de Talais, le pain du supermarché Champion (cuisson de pâtes surgelées précuites)… et le marché. « Si Elodie est absente du marché, je ne m'en porterais pas plus mal, explique le boulanger Jacques Bon. Mais si elle est présente, je n'en ferais pas une maladie. » J-F. Saubesty est plus inquiet : « Pour faire le marché à la saison je recrute des employés (de 4 l'hiver à 17 l'été), il faut pouvoir les rémunérer. Ce sont les charges et notamment la prime de précarité qui nous fragilise. Je crains que la venue d'Elodie soit la porte ouverte à la multiplication des étals vendant du pain sur un coin du stand ». Les dépôts de pain sont moins concernés par la concurrence, le pain ne représentant qu'une faible partie de leur chiffre d'affaires. Quant au point chaud, son gérant préfère louer le dynamisme de la jeune agricultrice.
Les deux boulangers traditionnels de Soulac se partagent aussi la fourniture de la maison de retraite Saint Jacques de Compostelle, du village Pierre et Vacances, du camping Palace… Là aussi, la guerre fait rage, des boulangers venant parfois de loin proposer leurs produits. « Je disposais de bonnes ventes au camping de l'Amélie, explique J-F. Saubesty, avant qu'un autre boulanger ne leur propose 35 % de marge. Au-delà de 25 %, comment faire encore du pain de qualité ? Déjà, cela me fait diviser par deux le bénéfice net de ces ventes. Un boulanger du sud Médoc est même venu démarcher ! »

> Elodie Aubert intervient dans un contexte où personne ne veut en perdre une miette, en dépit de sa production dérisoire par rapport aux entreprises installées (voir tableau). Elle craint que la perte du marché de Soulac ne remette en cause l'embauche prévue d'une salariée qu'elle a déjà reçue en stage. « Avec Marion, explique-t-elle, on est sur la même longueur d'onde. Je ferai le maximum pour qu'elle puisse travailler avec moi. Cette année j'ai planté mes propres céréales en culture bio. J'ai proposé par exemple à M. Saubesty de le fournir avec cette farine locale. » Depuis le 21 mars dernier, elle n'est plus salariée de ses parents sur l'exploitation de la Grande-Canau à Saint-Vivien ; elle a créé son entreprise en obtenant la certification bio de son pain. Outre la vente de pain au fournil de la Grande-Canau et sur les marchés locaux, elle développe un système d'abonnement type AMAP (association pour le maintien d'une agriculture paysanne). Avec l'appui d'une banque et de la Chambre d'agriculture de la Gironde, elle a acquis 21 hectares de prairies en friches dans les mattes du nord Médoc. En novembre dernier, elle y a semé sur 4 hectares les semences de blé rustique issues de variétés anciennes certifiées AB. Et puis comment douter de la motivation d'une femme qui a ramené par la route jusqu'à Saint-Vivien, à l'allure que l'on devine, le tracteur acheté en Ille-et-Vilaine ?
* La commission est composée de 14 élus municipaux parmi lesquels trois sont des commerçants du marché.