Rebondir grâce à la création ou à la reprise d’une entreprise ? C’est possible : une entreprise sur cinq est aujourd'hui créée par un demandeur d'emploi. Un chiffre qui, selon l’Insee, a plus que doublé depuis 2002. Conservation des droits Assedic, aides financières et protection sociale : suivez le guide.

Transformer une idée en projet, saisir une opportunité, faire d’une passion le cœur d’une nouvelle activité : une période de chômage peut devenir le moment idéal pour créer ou reprendre une entreprise. Surtout, entreprendre peut être un bon moyen pour sortir de difficultés financières et de la lassitude d’être exclu du marché du travail. Les demandeurs d’emploi ont plusieurs atouts : disponibilité, maintien des indemnités Assedic, exonération de charges sociales, etc. Nombreux sont ceux qui en ont déjà profité pour franchir le pas. A vous de les suivre…
Tout chômeur est-il libre de préparer un projet de création d’entreprise ?
Oui, il n’y a aucune ambiguïté à ce sujet. Les démarches accomplies en vue de la création ou de la reprise d’une entreprise constituent des « actes positifs de recherche d’emploi ». Pendant la phase d’élaboration de votre projet, vous êtes toujours considéré comme demandeur d’emploi par l’Assedic. Vous conserverez donc l’intégralité de votre allocation-chômage, dénommée ARE (allocation de retour à l’emploi) en langage administratif. L’antenne locale de l’ANPE pourra même vous orienter vers un professionnel pour vous aider à valider votre idée.
Une fois l’entreprise créée, pourrez-vous continuer à percevoir votre allocation-chômage versée par l’Assedic ?
Oui. Vous pourrez continuer à percevoir tout ou partie de votre allocation ARE, dans la limite de vos droits. Mais il existe des conditions. D’une part, vous devez demeurer inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi (en catégorie 6, 7 ou 8). D’autre part, votre nouvelle activité ne doit pas rapporter plus de 70 % de votre salaire brut de référence (ayant servi au calcul de votre ARE).
Si vous percevez des dividendes de la société créée, sont-ils pris en compte pour le calcul de ces 70 % ?
Non, seules comptent vos nouvelles rémunérations soumises à cotisations sociales. C’est-à-dire le bénéfice net déclaré aux organismes sociaux (cas d’une entreprise individuelle) ou votre rémunération (cas d’une entreprise soumise à l’impôt sur les sociétés).
Pendant combien de temps pouvez-vous cumuler allocation-chômage et revenus de l’entreprise ?
Pendant quinze mois au maximum si vous avez moins de 50 ans. Un délai qui ne s’applique pas aux plus de 50 ans.
Perdez-vous ce droit de cumul si vous créez l’entreprise pendant le préavis ou le délai de carence ?
Non. Votre situation sera identique à celle des chômeurs indemnisés. Le délai de dix-huit mois démarrera à partir du moment où vos allocations vous seront effectivement versées. C’est-à-dire après la période de carence et après la mise en œuvre des règles de cumul.
Dans tous les cas, quelles sont les formalités à accomplir ?
Il suffit de signaler la création de l’entreprise à l’ANPE et à l’Assedic, en indiquant sur votre déclaration mensuelle de situation (DSM) que vous êtes toujours à la recherche d’un emploi.
Comment l’allocation est-elle calculée pendant cette période de cumul ?
Chaque mois, l’Assedic déduira de votre allocation un nombre de jours. Avec quel mode de calcul ? Elle divisera le montant de vos gains mensuels par votre salaire journalier de référence. Le nombre de jours obtenus sera décompté mais non perdu pour vous : ils seront reportés d’autant. Par exemple, si votre nouvelle activité vous procure 1 000 euros de revenu mensuel et que votre salaire journalier de référence est de 60 euros, l’Assedic retranchera de votre allocation seize jours (1 000 / 60 = 16). Si vous avez 50 ans ou plus, le nombre de jours non indemnisables sera minoré de 20 %. Soit treize jours dans notre exemple.
Si vous créez une entreprise individuelle ou une EURL soumise à l’impôt sur le revenu (IR), vos revenus mensuels ne seront pas connus. Pourrez-vous alors percevoir la totalité de votre allocation-chômage ?
Non. Dans ce cas, l’Assedic détermine provisoirement le nombre de jours non indemnisables à partir d’une rémunération forfaitaire fixée à 531 euros par mois la première année d’activité et à 796 euros la deuxième. Ces forfaits vous imposent d’être vigilant : une régularisation annuelle sera effectuée l’année suivante. Elle sera faite à partir de vos revenus professionnels réels soumis à cotisations sociales. Si ceux-ci dépassent 70 % de votre salaire de référence, vous devrez rembourser à l’Assedic le trop-perçu d’allocation depuis la création de votre entreprise. Ce qui peut vous placer en difficulté si vous avez déjà dépensé ce trop-perçu !
Et si vous êtes dirigeant non rémunéré ?
Transmettez à l’Assedic le procès-verbal d’assemblée générale ordinaire, attestant que vous n’êtes pas rémunéré. De nombreuses antennes Assedic acceptent de maintenir l’intégralité de l’allocation dans un tel cas.
Que se passera-t-il en cas d’échec de votre entreprise ?
Vous retrouvez vos droits. Mais il existe deux cas :
> 1. Vous avez commencé à percevoir l’allocation-chômage avant la création de votre entreprise et il vous reste des droits non utilisés : vous pourrez vous réinscrire au chômage et retrouver le solde de vos droits sur une période fixée à la durée d’indemnisation à laquelle vous aviez droit, augmentée de trois ans.
> 2. Vous n’étiez pas inscrit comme demandeur d’emploi avant la création de votre entreprise : vous aurez trois ans, à compter de la fin de votre ancien contrat de travail, pour vous inscrire comme demandeur d’emploi et demander l’ouverture des droits acquis au titre de votre précédent emploi.
Quelle est la situation des personnes qui perçoivent l’ASS (allocation spécifique de solidarité) ?
Elles peuvent désormais cumuler la rémunération tirée de leur nouvelle activité avec leur allocation spécifique de solidarité (ASS) pendant douze mois. Sous conditions. Pour les allocataires de l’ASS, le cumul est intégral dans les six premiers mois si la rémunération brute mensuelle ne dépasse pas 698,81euros. Sinon, l’Assédic déduit un certain pourcentage du montant des allocations. Au-delà des six mois suivant la reprise d’activité, le cumul est partiel. Après douze mois, si le nombre total des heures d’activité n’atteint pas 750 heures, le bénéfice de l’allocation est maintenu jusqu’à ce que le bénéficiaire de l’ASS atteigne le plafond des 750 heures. Même s’il interrompt son activité, pendant six mois au minimum, il pourra également profiter des règles de cumul relatives à l’allocation.
Existe-t-il des aides spécifiques pour les chômeurs qui créent leur entreprise ?
Oui, le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Cohésion sociale a mis en place un dispositif global d’aide à la création ou à la reprise d’entreprise par les demandeurs d’emploi. Il regroupe un ensemble de mesures, dont l’exonération de charges sociales pendant douze mois (dispositif ACCRE), l’attribution de chéquiers-conseils et, pour certains demandeurs d’emploi, l’aide financière dénommée Eden.
Comment fonctionne le dispositif ACCRE ?
Avec l’ACCRE (aide aux demandeurs d’emploi créant ou reprenant une entreprise), le créateur ou le repreneur d’entreprise est exonéré des cotisations sociales pendant un an. Ce délai devrait bientôt passer à trois ans pour les entrepreneurs soumis au régime de la microentreprise (loi Borloo). Au final, le dispositif ACCRE s’adresse aux :
- demandeurs d’emploi indemnisés ou ayant au moins six mois de chômage ;
- RMistes et à leur conjoint ou concubin ;
- bénéficiaires de l’API (allocation parent isolé), de l’ASS (allocation spécifique de solidarité) et de l’AI (allocation d’insertion, devenue allocation temporaire d’attente, ATA) ;
- jeunes de moins de 26 ans (sans condition) et de moins de 30 ans (sous condition) ;
- salariés repreneurs de leur entreprise en difficulté ;
- les titulaires d’un contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE) s’ils sont dans l’un des cas ci-dessus.
Comment faire pour bénéficier de l’ACCRE ?
Vous devez vous adresser à votre Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP). Elle vous remettra le bon formulaire et un dossier à remplir. Attention, la demande doit impérativement être faite avant la création de l’entreprise. Les internautes peuvent télécharger le dossier sur le site du ministère (www.travail.gouv.fr) ou de celui de l’APCE (www.apce.com).
Ce dossier est-il compliqué à remplir ?
C’est un dossier de présentation de votre entreprise, avec des informations sur votre marché et des éléments financiers. Il peut sembler rébarbatif, mais il constitue un excellent guide pédagogique pour peaufiner le montage de votre projet. Remplissez-le consciencieusement, quitte à vous faire aider par un organisme d’accompagnement des créateurs, en utilisant un chéquier-conseil.
Comment obtenir des chéquiers-conseils ?
Les bénéficiaires de l’ACCRE peuvent demander à la DDTEFP des chéquiers-conseils (douze chèques avant la création et dix-huit une fois l’entreprise créée). Il s’agit d’une aide financière qui permet d’être épaulé par des conseillers lors de l’élaboration du projet et du démarrage de l’activité. Chaque chéquier-conseil, valable douze mois, comporte six chèques d’une valeur nominale de 45,74 euros. Le coût de l’heure de conseil étant fixé à 60,98 euros, le créateur n’a plus qu’à payer 15,24 euros par heure au prestataire. Les bénéficiaires du RMI ou de l’ASS ont droit à la prise en charge totale des six premières heures.
Qu’en est-il du dispositif Eden ?
Eden signifie « encouragement au développement d’entreprises nouvelles ». Il s’agit d’une avance remboursable qui peut atteindre 6 098 euros (plus en cas de pluralité de bénéficiaires pour un même projet). Ce prêt sans intérêt et sans garantie est d’une durée maximale de cinq ans. Cette avance est attribuée à une personne physique qui s’engage à l’intégrer au capital de la société créée ou reprise ou à l’utiliser pour le fonctionnement de l’entreprise individuelle créée ou reprise. Un différé de douze mois dans le remboursement peut être accordé. Attribué sous conditions et après expertise du projet de création ou de reprise d’entreprise, il s’adresse aux :
- jeunes de moins de 26 ans (ou de moins de 30 ans s’ils ne sont pas susceptibles de percevoir des allocations de chômage ou s’ils sont reconnus handicapés) ;
- jeunes de moins de 30 ans éligibles aux « nouveaux services-emplois jeunes » ainsi que ceux embauchés à ce titre et dont le contrat de travail a été rompu ;
- bénéficiaires de revenus de solidarité (ASS, API, RMI, AI et allocation veuvage) ;
- salariés repreneurs de leur entreprise en difficulté ;
- demandeurs d’emploi de plus de 50 ans ;
- les titulaires d’un contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE) remplissant les conditions pour bénéficier de l’ACCRE.
La demande d’aide doit être formulée auprès d’un organisme gestionnaire du dispositif, dont les coordonnées vous seront communiquées par la DDTEFP. Attention, certaines DDTEFP ont suspendu l’attribution de l’avance remboursable. Renseignez-vous bien auprès de votre DDTEFP territorialement compétente.
Pouvez-vous prétendre à d’autres aides ?
Oui, mais elles ne s’adressent pas qu’aux demandeurs d’emploi. Plusieurs organismes extra-bancaires accordent des prêts d’honneur ou solidaires. Parmi elles, l’Adie (Association pour le droit à l’initiative économique) s’adresse tout particulièrement aux exclus du système bancaire classique : chômeurs de longue durée, RMistes… Son téléphone est le 01 56 03 59 00 et son site web www.adie.org. Vous trouverez les autres structures dans la rubrique « A qui s’adresser ? » du site www.apce.com.
LE CONSEIL :
Etablissez votre bilan personnel en faisant le point sur vos talents et vos faiblesses, vos motivations profondes et vos contraintes. Et vérifiez que tous ces éléments sont compatibles avec votre projet d’entreprise. Cette étape essentielle est trop souvent négligée.
A quel régime de protection sociale est rattaché un demandeur d’emploi qui crée son entreprise ?
Dans la majorité des cas, le démarrage d’une activité indépendante entraîne l’affiliation au régime des travailleurs non salariés (TNS). Pour être rattaché au régime général des salariés, il vous faut obligatoirement créer une société de type SARL, SA ou SAS et y exercer des fonctions de dirigeant (gérant minoritaire ou égalitaire s’il s’agit d’une SARL) ou des fonctions techniques en qualité d’associé, titulaire d’un contrat de travail.
Quelle est votre situation si vous relevez à la fois du régime des travailleurs non salariés et si vous bénéficiez de l’ACCRE ou du maintien des allocations de chômage ?
Vous êtes affilié au régime général des salariés et à celui des travailleurs non salariés. Le régime qui prendra en charge vos remboursements de soins dépend de votre situation. Il existe trois cas :
1. Vous étiez indemnisé par les Assedic avant la création de votre entreprise et vous avez obtenu l’Accre : vous continuerez pendant un an à être couvert gratuitement par le régime général des salariés, à qui vous adresserez vos demandes de remboursement. Vous devrez néanmoins verser la CSG, la CRDS et les cotisations de retraite complémentaire dues au titre de votre activité indépendante (TNS).
2. Vous n’étiez pas indemnisé par les Assedic, mais vous avez obtenu l’ACCRE : vous serez couvert, à compter de la date de création de votre entreprise, par le régime des TNS. Vous serez toutefois exonéré du versement de vos cotisations sociales dans la limite d’une rémunération égale à 120 % du Smic, à l’exception de la CSG, de la CRDS et des cotisations de retraite complémentaire.
3. Vous n’avez pas obtenu l’ACCRE, mais vous bénéficiez du maintien de vos allocations pendant la phase de démarrage de votre activité : vous continuerez à être couvert par le régime général des salariés pendant cette période, mais vous serez redevable de cotisations aux caisses des TNS, au titre de vos revenus non salariés. Vous serez néanmoins dispensé, pour l’assurance-maladie uniquement, de verser des cotisations provisionnelles forfaitaires. Vos cotisations maladie seront calculées, l’année suivante, sur la base de vos revenus réels.
LE CONSEIL :
Recherchez le soutien de vos proches. La création d’une entreprise peut avoir des répercussions sur la vie de famille : sautes d’humeur, renonciation à certains loisirs, baisse provisoire du niveau de vie, déménagement… L’adhésion de votre conjoint est capitale.
Augmenter ses revenus grâce à l’entreprise que vous avez créée ou reprise, c’est s’offrir un bonus ! Encore faut-il savoir quel en sera l’impact sur votre imposition, au titre de vos revenus personnels ou de votre société. Or, tout dépend du statut que vous aurez choisi.
En matière d’impôt, tout dépend du statut juridique de l’entreprise que vous avez créée ou reprise. Mieux vaut donc choisir le bon ! Mais attention, d’autres aspects sont en jeu : la protection de votre patrimoine personnel, votre protection sociale, mais aussi la crédibilité offerte à vos partenaires (clients, fournisseurs, banquiers…) ou la possibilité d’accueillir des associés. La taille de votre projet est donc également à considérer.
Entreprises soumises à l’impôt sur le revenu (IR) : entreprises individuelles et EURL
Tous les revenus et bénéfices réalisés par votre entreprise sont à reporter dans votre déclaration personnelle de revenus (IR). Si votre activité est commerciale ou artisanale, ils relèvent de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Si votre activité est libérale, ce sont des bénéfices non commerciaux (BNC). Quant au taux d’imposition, il dépend de l’importance des revenus de votre foyer fiscal, toutes catégories confondues : autres revenus (allocations chômage maintenues, salaire, pension de retraite), rémunération du conjoint, etc.
Entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) : EURL (sur option), SARL, SAS…
Le fisc distingue votre rémunération (en qualité de gérant ou de salarié) du bénéfice de l’entreprise. La rémunération est à reporter dans votre déclaration d’impôt sur le revenu, dans la catégorie des traitements et salaires. De son côté, le bénéfice de l’entreprise fait l’objet d’une déclaration d’impôt sur les bénéfices auprès de l’Administration. Le taux normal de l’impôt sur les sociétés est de 33,33 % en 2006, réduit à 15 % sous certaines conditions (petites entreprises).
Cas d’une entreprise déficitaire
Si l’entreprise est soumise à l’impôt sur le revenu (entreprise individuelle, EURL par exemple), le déficit est porté sur votre propre déclaration fiscale. Il vient réduire d’autant vos autres sources de revenus. Le déficit non imputé sera reportable sur les six années à venir. Cette imputation du déficit n’est toutefois pas possible avec le régime de la microentreprise. Si l’entreprise est soumise à l’impôt sur les sociétés, les éventuels déficits sont reportables sur les bénéfices à venir sans limitation de durée.
Le régime fiscal de la micro-entreprise
Il existe deux façons de déterminer le bénéfice imposable d’une entreprise. La première est le régime réel : l’entreprise détermine elle-même son bénéfice imposable en tenant une comptabilité régulière. La seconde est la méthode forfaitaire de la micro-entreprise, possible uniquement si le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 27 000 euros (prestataires de services) ou 76 300 euros (activité de vente). C’est alors le fisc qui calcule son bénéfice imposable. Il déduit du chiffre d’affaires un abattement forfaitaire pour frais professionnels (de 37 à 72 %). Ce régime de la micro-entreprise est réservé aux seules entreprises individuelles. Il a un inconvénient : il n’y a jamais de déficit puisque les charges réelles ne sont pas prises en compte.