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S'installer en solo : les sept erreurs qui tuent... et comment les éviter

par Alain Genestine 28 Avril 2007, 15:28 Chômeurs ou Licenciés ...un Libéral vous aide!


Le parcours des solos est semé d'embûches.
1. Démarrer trop tôt ou ... trop tard

Des exemples: Le solo débutant doit d'abord faire attention au timing ! « Je me suis inscrite à l'Urssaf beaucoup trop tôt car je n'ai signé mon premier contrat que neuf mois plus tard. J'avais tellement peur d'être dans l'illégalité ! » raconte Micheline Maximin, consultante en fidélisation de clientèle à Paris. Funeste erreur, car la date d'inscription au centre de formalités des entreprises (CFE) déclenche le calcul des charges sociales. Mieux vaut donc prospecter d'abord et procéder aux formalités administratives la veille de la facturation. D'autant qu'aujourd'hui le travailleur indépendant est inscrit le jour même de ses démarches et que le futur gérant de SARL n'attend guère plus de dix jours pour obtenir son extrait de K bis .

« Au CFE de Créteil, on m'a même demandé si j'avais déjà des clients, raconte Pierre Mazenq, entraîneur sportif au Racing Club de France et coach. J'ai eu le réflexe de répondre que oui, sinon, on ne m'aurait pas inscrit ! » Explication : l'Urssaf, qui joue le rôle de CFE pour les professions libérales, fait la chasse aux vrais salariés déguisés en indépendants. Et cherche à s'assurer de l'existence d'un carnet de commandes. Aberrant, voire abusif, mais réel !

Reste que le créateur qui souhaite acheter un droit au bail n'a guère le choix, comme en témoigne Sophie Nenner, gérante de la société Vélo Electro, à Paris. « J'ai été obligée de créer ma société sans affectation de code APE et en établissant le siège à mon domicile car je devais immédiatement fournir un chèque au nom de ma société pour réserver un local où vendre et réparer des vélos. » Les salariés qui décident de se mettre à leur compte doivent annoncer leur départ à l'employeur ni trop tôt, ni trop tard. « Ayant deux clients sous le coude, j'ai créé ma société le 2 avril 2005 et j'ai été licenciée le 22 avril 2005. Il n'y a pas eu de temps mort », se réjouit Angélique Warain, créatrice de Comun' Ange.

2. Etablir un plan d'affaires trop optimiste

Si les clients affluent avant même la création de l'entreprise, c'est plutôt bon signe. Mais ce succès commercial ne doit pas occulter les charges sociales et les impôts qui vont lourdement grever les futurs revenus. Prenons l'exemple d'un consultant célibataire, sans charge de famille, qui démarre son activité. A investissement constant, plus ses recettes seront élevées, moins il aura de charges. Avec 5 000 euros de chiffre d'affaires par mois, il lui restera 50 % de revenus nets. Avec 1 500 euros, seulement 42 %. Autant le savoir avant de démarrer.

Si l'on décide de quitter un job rémunéré 3 500 euros par mois, on devra générer 82 440 euros de chiffre d'affaires brut par an, soit 687 euros hors taxes par jour, sur 120 jours travaillés, pour conserver le même train de vie. En cas de marché tendu, on peut diminuer son prix de journée. Mais ce n'est pas toujours possible. « Je facture entre 550 et 600 euros la journée d'interprétation. Ce sont les tarifs définis dans ma profession et il est mal vu d'aller en dessous », explique Robert de Loaiza, traducteur-interprète de conférence. Reste à mettre les bouchées doubles. Rien n'empêche de facturer 250 jours par an. Mais attention au burn-out ! Surévaluer ses capacités se paie cher.

 

Comment calculer son tarif journalier ?
 

Quel tarif journalier pratiquer si l'on souhaite, par exemple, conserver un revenu net par mois de 3 500 euros ? Reprenons l'exemple de l'indépendant célibataire sans enfants évoqué en page précédente. Pour qu'il lui reste 42 000 euros nets de charges et d'impôts, il doit facturer 82 440 euros de chiffre d'affaires brut. En effet, quand il facture 100 euros à un client, il lui reste 51 euros de revenus nets. Pour fixer son tarif à la journée, la méthode est la suivante : il faut diviser ces 82 440 euros par le nombre de jours où il sera rémunéré, soit environ 120 jours dans l'année, compte tenu du temps nécessaire à la prospection commerciale et à la gestion.

Résultat : notre consultant doit facturer 687 euros HT par jour.

Chiffre d'affaires brut 82 440 euros

Charges sociales 20 553 euros

Autres charges 5 590 euros

Impôt + CSG-CRDS non déductibles 14 297 euros

Total charges + impôts = 40 439 euros

Reste : 42 000 euros

(3 500 euros x 12)

Notre solo a les mêmes frais que ceux pris en compte pour la simulation précédente (voir l'encadré « Que va-t--il vous rester après charges et impôts ? » page 44) . Il a adhéré à une association de gestion agréée et bénéficie à ce titre de 20 % d'abattement pour l'impôt sur le revenu.
 

3. Se tromper de forme juridique et de régime fiscal
D'une manière générale, les commerçants solos, qui ont des investissements lourds, optent pour la SARL. Ce n'est pas le cas des professions libérales (consultants, graphologues, interprètes...), qui optent plutôt pour l'entreprise individuelle. Mais, dès que leurs revenus augmentent, ils doivent songer à créer une société. « Avec un chiffre d'affaires de 240 000 euros par an, j'ai abandonné le statut d'indépendant pour créer une SARL afin d'être moins imposée », admet Micheline Maximin. Notons que l'impôt sur les sociétés est de 34,83 %, mais qu'il passe à 15,25 % si les bénéfices sont inférieurs à 38 120 euros, sous certaines conditions. Quoi qu'il en soit, le solo y gagnera en comparaison de l'impôt sur le revenu qui avoisine les 58 % dans la tranche maximale.

« Plutôt qu'exercer en nom propre, un consultant qui gagne bien sa vie peut créer une EURL avec une option à l'impôt sur les sociétés afin de limiter sa charge fiscale », conseille Laurence Piganneau, consultante à l'APCE et auteur de La Micro-Entreprise de A à Z (Editions d'Organisation). Reste le choix du régime fiscal. Si l'on est imposé aux BNC (bénéfices non commerciaux) en tant que profession libérale ou aux BIC (bénéfices industriels et commerciaux) en tant que commerçant ou artisan, le régime de la micro-entreprise est séduisant car il permet de ne pas tenir de comptabilité et offre un abattement forfaitaire. « Mais, si l'on achète du matériel ou un stock, le régime micro ne permet pas de récupérer la TVA.

L'option pour le régime réel permet de prendre en compte les charges réellement supportées et de bénéficier de l'abattement fiscal de 20 % si l'on adhère à un centre ou une association de gestion agréée. »

4. Ne pas opter pour le bon régime social
Angélique Warain a créé une SARL dont elle est gérante associée minoritaire. « Ma mère détient 51 % du capital pour que je puisse avoir le régime général des salariés », reconnaît la jeune femme. Une situation très répandue. Bien des créateurs sont tentés de demander à l'un des membres de leur famille de jouer les prête-noms pour bénéficier de ce statut. Le jeu en vaut-il la chandelle ? « Mieux vaut garder la majorité du capital afin de rester maître à bord de sa société, met en garde Laurence Piganneau. D'autant que le gérant majoritaire - mais aussi le travailleur indépendant, le gérant d'une EURL - peut avoir une couverture sociale identique à celle des salariés, sans que le coût soit plus élevé. » Nul tour de passe-passe.

Le dispositif de la loi Madelin permet aux TNS (travailleurs non salariés) de déduire leurs cotisations à une caisse de retraite complémentaire, une mutuelle maladie, maternité ou à une assurance chômage du type GSC (garantie sociale des chefs d'entreprise) ou Appi (association pour la protection des patrons indépendants). Notons que, pour un revenu mensuel de 3 500 euros net, le statut de gérant minoritaire se révèle plus onéreux que celui d'un travailleur indépendant qui a pris des assurances complémentaires afin d'avoir une protection sociale similaire. Si les TNS peuvent couvrir l'interruption de leur activité par un contrat Madelin, le gérant minoritaire de SARL, lui, est souvent en butte à l'Assedic, qui ne reconnaît pas son contrat de travail, au moment où il se retrouve au chômage.

Cela ne l'a pas empêché d'accepter ses cotisations pendant de longues années ! Reste que, en cas d'échec, le créateur bénéficie d'une indemnisation de l'Assedic, dans les trois ans à compter de la fin de son contrat de travail. Mais le temps file vite...

5. Ne pas prévoir le "coup du lapin"
Se rémunérer dès la première année est un luxe auquel renoncent bien des solos. Mais cela peut se retourner contre eux. « Je ne me verse pas de salaire car je peux percevoir des allocations de chômage pendant dix-huit mois », plaide Sophie Nenner, gérante minoritaire de la SARL Vélo Electro. En effet, les chômeurs créateurs d'entreprise peuvent continuer à percevoir leurs indemnités si leur nouvelle activité ne leur rapporte pas plus de 70 % du salaire qui a servi de base au calcul des allocations de chômage. Toutefois, Sophie Nenner regrette : « Je ne peux pas bénéficier de l'Accre [aide au chômeur créateur ou repreneur d'entreprise], c'est-à-dire de l'exonération de charges sociales pendant un an puisque cela ne concerne que la rémunération du créateur. Cette exonération m'aurait été précieuse si elle avait pu s'appliquer au salaire de l'employé que j'ai recruté à temps partiel en contrat à durée déterminée. »

Faute de revenus professionnels de référence, les cotisations du non- salarié sont calculées sur une assiette forfaitaire. Le montant global reste faible : de 1 800 à 5 000 euros les deux premières années, selon que l'on dépend du régime des commerçants, artisans ou professions libérales. Cela permet de vivre plus largement. Mais, la troisième année, une régularisation est faite par rapport à la rémunération effective. Si l'on n'a pas économisé, c'est le « coup du lapin » ! « Il est possible depuis l'ordonnance du 18 décembre 2003 de demander le calcul de ses cotisations provisionnelles sur la base du revenu que l'on estime pouvoir réaliser au cours de l'année, souligne Laurence Piganneau. Cela peut éviter les mauvaises surprises. Mais les créateurs qui ne sont pas soumis au régime de la micro-entreprise en font rarement la demande, car, si le revenu définitif est supérieur de plus du tiers au revenu estimé, une majoration de retard égale à 10 % de l'insuffisance des acomptes prévisionnels est due. »

6. Attendre le financement d'un formation
Un peu de temps libre ? Pourquoi ne pas en profiter pour se perfectionner ou se former dans un nouveau domaine ? Hélas, ce n'est pas si simple, dès lors que l'on souhaite la gratuité de sa formation... « Avant de démarrer ma nouvelle activité, j'avais besoin de faire une formation de réparateur de vélos qui coûtait 1 000 euros, raconte Sophie Nenner. Le CFE auprès duquel j'ai immatriculé ma société, en l'occurrence la chambre de métiers de Paris, m'a soutenu que ma formation ne pouvait pas être financée. En revanche, l'ANPE m'a certifié qu'elle participerait dès lors qu'un organisme public en assurerait le cofinancement, mais sans me donner la moindre piste. Je me suis adressée au conseil général d'Ile-de-France, qui m'a orientée vers le fonds d'aide à la formation (FAF). Le FAF national a accepté une prise en charge à hauteur de 50 % tandis que le FAF régional, qui devait financer l'autre moitié, s'est abstenu. Heureusement que je ne les ai pas attendus pour suivre la formation ! »

Sophie Nenner a eu le tort de créer son entreprise trop tôt ! Depuis la loi du 2 août 2005 en faveur des PME, la formation professionnelle continue des artisans est étendue aux créateurs et repreneurs d'entreprise. Reste à faire connaître cette mesure aux acteurs concernés, qui, bien souvent, pédalent dans la semoule. Autre bonne nouvelle : les frais du stage obligatoire de préparation à l'installation des artisans (environ 200 euros) devraient désormais être pris en charge par les FAF. Une formation à la comptabilité et un suivi post-création seraient par ailleurs imposés. Des mesures de choc, qui devraient éviter les mécontentements de bien des créateurs, comme Sabrina Gaillard, esthéticienne à domicile, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée). « J'ai dû faire un stage qui m'a mobilisée pendant cinq jours et je n'ai rien appris. Le seul intérêt : j'ai pu échanger des tuyaux avec d'autres stagiaires en matière de publicité. »

7. Trop compter sur les aides
La création d'entreprise synonyme d'aides ? Cela fait belle lurette que les solos ont perdu leurs illusions. Mais ils essaient... Les « petits veinards » sont ceux qui s'installent dans des zones géographiques en difficulté, les jeunes et les demandeurs d'emploi. Ils ont quelque chance de décrocher des exonérations, subsides ou prêts sans intérêt. A condition qu'ils s'arment de courage ! « Il m'a fallu présenter un business plan détaillé pour obtenir une aide de 3 000 euros du conseil général, au titre de l'APRCEJ, la prime à la création d'entreprise pour les jeunes de moins de 26 ans. C'était long et complexe ! Quant à l'APRCEA, la prime à la création d'une entreprise artisanale, elle n'était pas cumulable avec l'APRCEJ, » raconte Sabrina Gaillard. Bref, il ne faut pas rêver !

Parfois, ça grogne dur. En ce moment, certaines DDTEFP (directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle) gèlent les dossiers des futurs créateurs, car les fonds ne leur sont pas parvenus ! Pourtant, les candidats ont droit à l'Accre, à Eden (encouragement au développement d'entreprises nouvelles) ou aux chéquiers-conseil. Quant au prêt à la création d'entreprise (PCE), dont l'obtention est conditionnée à celle d'un prêt bancaire, et qui ne requiert ni garantie ni caution personnelle, il pâtit du peu d'enthousiasme des banquiers à le proposer. Ceux-ci considèrent que les démarches auprès d'Oseo BDPME sont trop lourdes. Restent les concours à la création d'entreprise. Beaucoup d'appelés, peu d'élus. « Il faut se renseigner sur le nombre de bénéficiaires car, bien souvent, les concours offrent un seul prix », avertit Laurence Piganneau, sans deuxième et troisième prix d'encouragement. Mieux vaut donc prospecter plutôt que transpirer sur son dossier de candidature.
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commentaires
D
Bravo Aramis pour ce dossier pédagogique sur la création d'entreprise. Je m'y retrouve totalement ;-)Amitiés,
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