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La conférence des ambassadeurs - compilation des discours prononcés

par AL de Bx 27 Août 2010, 23:23 Politique

Allocution d’ouverture de Nicolas
Sarkozy (25 août 2010, Palais de l’Elysée)
DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Palais de l’Élysée — mercredi 25 août 2010
"Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères et Européennes,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,


Il est des moments de l’Histoire où le sort hésite entre le meilleur et le pire. Des moments où tous les efforts
accomplis peuvent être perdus ou, au contraire, déboucher sur des progrès durables. Nous sommes aujourd’hui
dans l’un de ces moments.
C’est vrai pour l’action de la communauté internationale dans cet arc de crise qui s’étend des frontières du
Pakistan aux confins du Sahel, en passant par l’Iran et le Proche-Orient.
C’est vrai pour l’Europe, où le traité de Lisbonne et les décisions prises face à la crise financière ouvrent des
perspectives qui restent à développer pour faire de l’Union un acteur global.
C’est vrai pour l’économie mondiale qui n’a pas encore retrouvé le chemin d’une croissance solide et durable,
alors que le G20 doit convaincre qu’il a la volonté de poursuivre les réformes nécessaires.
A la grande table où se prennent les décisions, de nouveaux acteurs ont rejoint les puissances reconnues. A
juste titre, ils réclament la reconnaissance de leurs droits. Mais il leur faut aussi accepter qu’avec ces droits
viennent des devoirs, des responsabilités à assumer. Il leur faut reconnaître que leur réussite éclatante leur
impose de dépasser la stricte défense de leurs intérêts nationaux pour apporter leur contribution au règlement
des problèmes du monde. Ce mouvement est engagé et je m’en réjouis.
Dans ce moment de l’Histoire où le sort hésite, pour faire pencher la balance du bon côté, nous avons en effet
besoin de volonté et d’unité. Si nous sommes divisés et hésitants, si nous ne parvenons pas à nous entendre sur
les objectifs à atteindre et sur les moyens pour y parvenir, entre puissances reconnues et grands pays
émergents, si nous ne sommes pas capables de jouer collectif face aux défis du terrorisme et de la
prolifération, des déséquilibres économiques et du réchauffement climatique, alors nous aurons failli à notre
devoir.
Dans ce moment de l’Histoire où le sort hésite, la France doit affirmer sa vision, sa détermination. Mais elle
doit tout autant chercher à rassembler, aider à trouver pour chacun des grands défis que nous devons affronter,
le chemin qui rapproche, celui du progrès et de l’ambition. J’attends de chacune et de chacun d’entre vous
qu’il porte la voix de la France, mais aussi qu’il sache être à l’écoute des attentes du monde.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
La lutte contre le terrorisme demeure une priorité majeure.
Toutes les analyses confirment certes que, depuis 2001, sous les coups qui lui ont été portés, la capacité d’Al
Qaïda de lancer des attaques dévastatrices contre des pays occidentaux a été fortement réduite. En revanche,
Al Qaïda et ceux qui s’en réclament ont accru leur emprise et leur violence meurtrière dans certains Etats, du
Pakistan au Mali.
Chaque pays fait face à une situation spécifique qui doit recevoir une réponse adaptée des gouvernements en
charge, avec le soutien de la communauté internationale. Il n’y a pas aujourd’hui de coordination
opérationnelle entre les groupes qui agissent d’un bout à l’autre de cet arc de crise. Mais si la situation devait
se dégrader, le risque serait grand de voir apparaître une chaîne continue liant les bases terroristes de Quetta et
du Sud-afghan à celles du Yémen, de la Somalie et du Sahel.
Sur l’Afghanistan, la mode du moment, chez les commentateurs, est au catastrophisme. Chaque jour on nous
annonce le retour des Talibans, comme si les jeux étaient faits, comme si nous allions abandonner le peuple
afghan.
La réalité est que les Talibans restent forts, malgré des pertes importantes, dans le Sud et l’Est. En revanche, le
reste du pays ne connaît pas de violences majeures. La coalition et le gouvernement afghan ont su adapter leur
stratégie et continuent de le faire. Ma conviction est que nous réussirons en poursuivant notre action avec
détermination. Chacun doit assumer pleinement ses responsabilités, clairement établies lors des conférences
de Londres et de Kaboul.
Celles des alliés, les nôtres, sont de défendre les Afghans dans les régions où les Talibans menacent ; de
former des forces de sécurité afghanes aptes à combattre par elles-mêmes ; et enfin d’apporter à la population
une aide civile adaptée à ses véritables besoins. C’est ce que la France fait dans sa zone de responsabilité,
Kapisa et Surobi. Le prix humain est lourd. Et c’est encore alourdi cette semaine. Mais imaginons ce qu’il en
serait si nous n’étions pas là ? Souvenons-nous de ce que les Talibans ont fait dans le passé et des milliers de
victimes afghanes qu’ils continuent de faire.
Le gouvernement afghan, pour sa part, doit impérativement améliorer la gouvernance du pays, combattre la
corruption et la drogue. Il doit aussi, et c’est sa mission centrale, proposer la réconciliation à ceux qui
renoncent à la violence, coupent tout lien avec Al Qaïda et respectent les institutions afghanes. Enfin, il faut
que le gouvernement afghan se prépare sérieusement à prendre en charge la sécurité des provinces et districts
qui seront jugés assez stables pour lui être transférés.
Notre action au service de la paix ne doit pas être soumise à des calendriers artificiels ou aux humeurs
médiatiques. Nous avons des objectifs politiques réalistes, passant par une transition progressive et ordonnée.
Nous avons une stratégie claire : mettons-la en oeuvre jusqu’au bout ! La France restera engagée en
Afghanistan, avec ses alliés, aussi longtemps que nécessaire et aussi longtemps que le souhaitera le peuple
afghan.
Mais aucune victoire ne sera possible et durable sans le concours du Pakistan. Ce pays fait face
courageusement, et avec l’aide du monde entier, aux conséquences d’inondations sans précédent. Il est
confronté à des défis économiques et sociaux immenses. Il doit vaincre le terrorisme chez lui. Mais il doit
aussi agir contre les sanctuaires où les terroristes afghans trouvent refuge. C’est ce que j’ai dit au Président
Zardari le 2 août. La France sera aux côtés du Pakistan dans ce combat contre toutes les formes de terrorisme.
Il doit être mené sans ambigüité. Moins il y aura d’ambigüité, plus la communauté internationale sera
convaincue qu’il est utile d’aider son gouvernement.
Au Yémen, c’est la stabilité de toute la péninsule arabique qui est en cause. Il y a un an, alors qu’un
mouvement armé s’étendait et menaçait de déborder sur l’Arabie Saoudite voisine, plusieurs pays, dont la
France, ont assumé leurs responsabilités. Une trêve fragile a succédé aux affrontements violents. Mais le
problème demeure. Il ne pourra être réglé que par le dialogue et des réformes.
De l’autre côté du Golfe d’Aden, en Somalie, l’enjeu est clair : les attentats meurtriers de Kampala, en juillet,
ont montré que les milices islamistes des Shebab ont désormais la capacité d’étendre leurs combats bien audelà
des frontières. Leur victoire à Mogadiscio transformerait la Somalie en base de départ d’Al Qaïda. Elle
achèverait de déstabiliser toute une région déjà fragilisée par les déchirements du Soudan.
La France contribue par sa présence militaire à Djibouti, au Tchad et en RCA, à la stabilité régionale. Elle va
accentuer son effort en Somalie, en réponse aux demandes de l’Union africaine et avec ses partenaires
européens. Après les 500 formés à Djibouti, ce sont 2.000 soldats somaliens qui sont actuellement entraînés en
Ouganda, tandis que la force africaine AMISOM dont nous avons déjà formé 5.600 hommes, va être
renforcée.
Bien sûr, il n’y aura pas de solution purement militaire. L’Union européenne, premier donateur d’aide, doit
maintenir son effort et, avec tous les autres soutiens extérieurs, aider le gouvernement à élargir son assise
politique, préalable nécessaire à la reconstruction de structures étatiques. C’est ce chemin aussi qui permettra
de régler dans la durée le problème de la piraterie.
Enfin, au Sahel, la barbarie de la branche maghrébine d’Al Qaïda s’est à nouveau illustrée avec le refus de
toute négociation et l’assassinat de Michel Germaneau. Ces terroristes cherchent à étendre leur emprise sur
des immensités désertiques où les Etats peinent à affirmer leur présence.
Pour la première fois, en juillet, un coup sévère a été porté aux terroristes grâce à une attaque menée par des
forces mauritaniennes avec le soutien de la France. Je vous le dis : ce jour-là marque un tournant majeur. La
France aide sans réserve les gouvernements qui lui en font la demande à former, équiper, renseigner les forces
mobiles dont ils ont besoin pour éliminer des groupes qui menacent de déstabilisation tout le Sahel.
Parallèlement, notre coopération civile aide les Etats à renforcer leur soutien aux populations et je souhaite
que l’Union européenne s’implique davantage dans ce domaine.
La France se tient aussi aux côtés de l’Algérie, du Maroc, de la Tunisie et de la Libye : leur combat contre le
terrorisme est le nôtre, car leur sécurité ne peut être séparée de la nôtre.
*
Au coeur de cet arc de crise, il y a l’Iran. Le régime exerce son contrôle par la répression et recourt
massivement aux exécutions capitales, y compris sous la forme la plus odieuse : la lapidation, dont est
menacée Mme Mohammadi. Il alimente la violence et l’extrémisme dans la région. Mais surtout, il représente
aujourd’hui la principale menace à la sécurité internationale dans un domaine majeur : la prolifération.
Qu’on me comprenne bien : la France est favorable au développement, dans le strict respect des normes
internationales, de l’électricité d’origine nucléaire. C’est pourquoi elle salue le démarrage de la centrale de
Buscher dont le combustible est et sera en totalité fourni par la Russie. Le problème est naturellement ailleurs.
Il y aura bientôt un an, à Pittsburgh, avec Barack Obama et Gordon Brown, nous avions révélé l’existence du
site nucléaire clandestin que l’Iran construisait pour ses activités proliférantes. J’avais alors dit qu’il faudrait
imposer à l’Iran des sanctions s’il ne changeait pas de politique. Nous y sommes. Le Conseil de sécurité, les
Etats-Unis, l’Union européenne, d’autres encore, ont pris des mesures robustes, et même sans précédent
s’agissant des Européens. Il était grand temps. Car chacun connaît les conséquences graves d’une politique qui
laisserait l’Iran poursuivre sa course nucléaire : ce serait la prolifération généralisée dans la région, ou
l’intervention militaire ; en tous cas une crise majeure.
Nous allons donc mettre en oeuvre ces sanctions avec détermination et j’appelle tous les pays à faire de même.
On dit parfois que les sanctions ne marchent pas, voire qu’elles mènent à la guerre. C’est faux. Elles échouent
quand elles sont trop faibles ou n’ont pas d’objectif clair. Le nôtre est simple : faire comprendre à l’Iran que
ses choix ont un coût élevé et croissant, et qu’il existe une alternative : l’engagement de négociations ; mais
des négociations sérieuses, concrètes, allant au coeur du sujet. L’Iran y est-il prêt ? Nous verrons en septembre,
quand Mme Ashton et les Six rencontreront les négociateurs iraniens et que le dialogue s’engagera à Vienne
sur la fourniture d’uranium pour le réacteur civil de Téhéran.
Je souhaite qu’un bon accord soit trouvé dans les mois qui viennent, que l’Iran respecte le droit, que les
préoccupations internationales soient levées. Celles des voisins de l’Iran doivent être prises en compte et ils
devront être consultés sur tout accord.
Mais si un accord crédible ne pouvait être conclu, alors l’isolement de l’Iran s’accroîtrait inexorablement.
Face à une menace qui se préciserait, il faudrait aussi nous organiser pour protéger et défendre les Etats qui se
sentiraient menacés.
*
Certains affirment que les violences d’un bout à l’autre de l’arc de crise ont une cause unique : l’absence de
solution au conflit israélo-palestinien. C’est évidemment faux. Ceux qui tuent à Bagdad ou à Kandahar
veulent éliminer leurs ennemis en Irak ou en Afghanistan. En revanche, qui ne comprend qu’un règlement de
paix entre Israéliens et Palestiniens transformerait la donne politique dans le Proche-Orient tout entier ?
Là encore, le sort hésite. Là encore, c’est une question de volonté et de détermination. Je vous l’affirme : un
accord de paix, dont tout le monde connaît les paramètres, peut être signé dans le délai d’un an. La relance des
négociations directes le 2 septembre, crée une immense attente, un immense espoir. Ils ne devront pas être
déçus. Un Etat palestinien viable et démocratique, établi sur la base des frontières de 1967, est à la fois un
droit pour les Palestiniens et la meilleure garantie, pour Israël, de sa sécurité et de sa pleine intégration dans la
région, conformément à l’Initiative arabe de paix. C’est aussi la seule voie, dans l’intérêt des deux peuples,
pour réduire les extrémismes et pour redonner confiance en l’avenir. La communauté internationale tout
entière devra accompagner le processus désormais relancé.
C’est pourquoi la France propose d’accueillir la deuxième conférence de Paris d’aide au peuple palestinien
pour financer l’achèvement de la construction de l’économie et des structures du futur Etat. Au-delà des
engagements financiers qui en résulteront, il s’agira d’une manifestation concrète et forte de la volonté de la
communauté internationale de voir aboutir la solution des deux Etats.
Dans le même esprit, la France souhaite, avec la co-présidence égyptienne, que le deuxième sommet de
l’Union pour la Méditerranée se tienne à Barcelone fin novembre. Ce sera l’occasion d’adopter plusieurs
grands projets économiques qui témoigneront de la capacité de tous les pays participants à bâtir ensemble un
avenir meilleur pour tous les peuples de la Méditerranée.
La paix entre la Syrie et Israël est tout aussi possible. La France, qui a renoué avec Damas un dialogue
régulier et utile pour toute la région, s’implique, notamment aux côtés de la Turquie, dans la recherche d’un
accord. J’ai confié une mission dans ce sens à l’Ambassadeur Jean-Claude Cousseran, qui a toute ma
confiance.
Au moment où l’espoir renaît dans la région, il serait inacceptable que le Liban sombre à nouveau dans la
violence. La France s’est félicitée de la visite conjointe à Beyrouth du Roi Abdallah d’Arabie Saoudite et du
Président Bachar Al Assad. Elle apporte tout son soutien à ses institutions démocratiques, au Président
Sleimane et au Premier Ministre Hariri. Profondément attachée à ce pays, la France est l’amie de tous les
Libanais. Elle oeuvre en faveur de la stabilité d’un Liban divers, où toutes les communautés doivent pouvoir
cohabiter dans la tolérance et le respect mutuels. L’action de la communauté internationale au Liban n’a pas
d’autre raison d’être que cette stabilité. Et c’est bien tout le sens de la mission de la FINUL au service de la
paix et de la souveraineté du Liban, que tous ses voisins doivent respecter.
*
* *
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
En Europe aussi, le sort hésite entre le meilleur et le pire. L’hiver dernier, ce fut le pire : soudain la crise de la
dette grecque était devenue, pour les commentateurs et même les marchés, une crise de l’Euro dont la viabilité
était mise en doute.
Permettez-moi, maintenant que l’orage est passé, de rappeler devant vous quelques vérités simples.
D’abord, les finances publiques de la zone euro dans son ensemble sont sensiblement moins dégradées que
celles des Etats-Unis ou du Japon, aussi bien en termes de déficits que de dette.
Ensuite, contrairement à ce que l’on dit trop souvent, les Européens ont su réagir efficacement, avec un plan
massif d’aide à la Grèce de 110 milliards d’euros et un plan de garantie financière de l’ensemble de la zone
euro de 750 milliards. Le gouvernement Grec, pour sa part, a pris et continue de prendre les mesures
courageuses qui s’imposent.
Certes, il eut mieux valu agir plus rapidement. Mais c’est oublier qu’en Europe, le processus de décision
implique 27 nations souveraines. Ce que l’Histoire retiendra, c’est que comme toujours, l’Europe a surmonté
ses difficultés en faisant le choix de la solidarité et de l’unité.
Ce que l’Histoire retiendra, c’est que ces difficultés ont été l’occasion de nouveaux progrès de l’Union
puisqu’elles ont permis l’affirmation de son gouvernement économique.
Ce que l’Histoire retiendra, c’est qu’une fois de plus, l’entente franco-allemande, malgré des approches
initiales différentes, a permis ce progrès de l’Europe. Au moment crucial, l’entente franco-allemande a été
décisive.
Ce que je retiens de cette épreuve, c’est que nous devons renforcer l’efficacité des institutions européennes.
C’est engagé avec le Président stable du Conseil européen, la Haute Représentante pour l’Action Extérieure et
le Service qui lui est rattaché. La prochaine étape, c’est le gouvernement économique à 27 avec, chaque fois
que nécessaire, des rencontres entre les 16 de la zone euro. Il y a seulement quelques mois, l’idée d’un
Gouvernement économique européen était presque taboue, sauf pour la France. Aujourd’hui, toute l’Europe
s’accorde pour reconnaître qu’un véritable Gouvernement économique européen est non seulement nécessaire
mais indispensable. Il faut maintenant le mettre place concrètement. Les travaux sont en cours ; la France et
l’Allemagne ont fait des propositions ambitieuses, qui ont été présentées lors de notre Conseil des Ministres
du 21 juillet par M. Schauble et Mme Lagarde. Dès le mois d’octobre, le Conseil européen prendra les
décisions qui s’imposent sur la base des propositions de son président, Herman Van Rompuy.
Mais l’Europe ne peut pas en rester seulement aux questions économiques, quelle que soit leur importance.
Ce que l’Histoire nous enseigne, c’est qu’aucun espace de prospérité n’a survécu sans être en mesure
d’assurer sa sécurité et la défense de ses intérêts. En Europe, nous sommes loin du compte.
La crise accroît encore le décalage entre l’effort de nos alliés américains et ceux, en réduction et dispersés, des
Européens. Lors de la Présidence française de l’Union, nous avons défini ensemble des réponses. Il faut les
mettre en oeuvre, car on ne défendra pas l’Europe avec des murailles de procédures et des bataillons en papier.
Face aux menaces contre nos intérêts vitaux, nous avons la dissuasion nucléaire, qui est aussi la garantie de
notre indépendance. Mais face aux défis nouveaux, les Européens prennent du retard, alors qu’il leur faut
aussi participer à la sécurité des mers, essentielle pour notre commerce, à celle de l’espace et, désormais, du
cyber-espace.
La France est prête à s’engager sur des projets concrets qui nous permettent d’accomplir les missions de
combat les plus exigeantes. J’ai entendu les déclarations de nos alliés britanniques sur la coopération bilatérale
avec la France. Nous sommes prêts à en discuter sans tabou.
C’est avec cette préoccupation à l’esprit que je me rendrai au Sommet de l’OTAN, fin novembre à Lisbonne,
où nous adopterons un nouveau concept stratégique.
Notre Alliance, militaire et nucléaire, est essentielle pour notre sécurité. Mais elle doit se réformer, dégraisser
ses structures et s’adapter à la nouvelle donne internationale. Elle a besoin de forces projetables et robustes et,
comme l’expérience afghane le montre, de mieux coordonner action militaire et action civile. Les nouvelles
menaces appellent une relation renouvelée et plus étroite de l’OTAN avec l’Union européenne.
Avec la Russie, nos intérêts communs doivent permettre de développer, si Moscou le souhaite, un partenariat
sans précédent pour la sécurité de tout l’espace euro-atlantique. La France fera dès le mois prochain des
propositions précises concernant les rapports de la Russie avec l’Union et avec l’OTAN, ou dans le cadre de
l’OSCE qui tiendra son sommet début décembre à Astana.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Avec 500 millions de citoyens et une puissance économique qui représente près de 30 % du PIB mondial, plus
de 35 % du total mondial des investissements directs à l’étranger et même près de 60 % du total de l’aide
publique au développement, l’Union européenne a en mains les cartes nécessaires pour s’imposer comme une
puissance économique globale.
Encore faut-il qu’elle ait la volonté de jouer ses atouts sans naïveté, dans le cadre d’une stratégie cohérente,
visant des résultats concrets et des bénéfices réciproques. L’Europe est le plus grand marché du monde et le
premier importateur : n’hésitons pas à en jouer avec exigence et fermeté pour nous ouvrir des marchés jusqu’à
présent trop fermés ! N’hésitons pas à nous battre pour imposer le respect des règles d’une concurrence
loyale ! N’hésitons pas à combattre le dumping fiscal, le dumping social et le dumping environnemental !
Le Conseil européen spécial du 16 septembre, qui sera consacré aux relations de l’Union européenne avec ses
grands partenaires, doit permettre de progresser sur tous ces points.
L’Union européenne doit aussi se donner les moyens de rester au premier rang de la compétition mondiale.
Pour cela, elle doit mettre en oeuvre avec détermination la stratégie économique que nous avons adoptée au
Conseil européen de juin. Elle doit mobiliser tous nos moyens financiers au service d’une croissance plus forte
et durable, en misant sur la recherche, l’éducation, l’emploi, mais aussi l’agriculture qui représente pour
l’Europe un volume d’exportations supérieur à celui de l’industrie aéronautique : l’Europe, comme les Etats-
Unis, doit utiliser son « pouvoir vert ».
*
Dans un monde en profonde mutation, dans cette Europe qui progresse, la France demeure bien placée parce
qu’avec le Premier Ministre et tout le gouvernement, nous avons engagé depuis trois ans un effort majeur de
modernisation de notre économie. Nous avons deux objectifs simples : réduire les écarts de compétitivité avec
les pays les plus performants et améliorer notre potentiel de croissance en desserrant tous les carcans
accumulés au fil des décennies.
C’est ainsi que nous avons défiscalisé et libéré les heures supplémentaires pour surmonter l’obstacle des 35
heures et décidé de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, dans le cadre d’un grand
mouvement de réforme de nos administrations.
C’est ainsi que nous avons supprimé la taxe professionnelle, un impôt qui n’existait que dans notre pays et qui
frappait les investissements des entreprises.
C’est ainsi que nous avons adopté le dispositif fiscal de soutien à la recherche dans nos entreprises le plus
attractif de tous les pays de l’OCDE.
C’est ainsi que nous avons accordé à nos universités un statut complet d’autonomie qui leur permet, par
exemple, de passer des accords avec les entreprises privées ou d’adapter leurs cursus universitaires.
C’est ainsi que nous avons lancé le grand emprunt qui nous permet d’investir 35 milliards d’euros dans
l’enseignement supérieur, la formation, la recherche et l’innovation. Avec les co-financements privés, l’effort
total d’investissement dans les technologies d’avenir sera de l’ordre de 60 milliards d’euros.
C’est ainsi que nous allons réformer notre système de retraites : c’est une réforme majeure, qui sera adoptée
cet automne par le Parlement ; une réforme nécessaire et juste ; une réforme qui renforcera la compétitivité de
la France.
Parallèlement, comme tous ses partenaires européens, la France va réduire son déficit public. Il passera de 8%
du PIB aujourd’hui à 6% en 2011 et 3% en 2013. Cela représente une réduction de notre déficit de 40
milliards d’euros dès 2011 et de 100 milliards d’ici 2013.
Ces réformes sont aussi nécessaires pour confirmer la confiance du monde dans l’économie française. Elles
portent déjà leurs fruits : en 2009, au plus fort de la crise, les investissements directs étrangers en France n’ont
baissé que de 4%, alors qu’ils reculaient de 37% au niveau mondial. La France demeure aujourd’hui au
troisième rang des pays d’accueil, derrière les Etats-Unis et la Chine.
*
* *
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Le 12 novembre, la France prendra la présidence du G20 pour un an, et le 1er janvier prochain, celle du G8.
Deux lourdes responsabilités, qui interviendront à un moment d’interrogation sur la vocation de ces deux
instances.
Créé sur proposition de la France, le G20 représente 85% de la richesse de la planète. Il a permis aux
principales puissances économiques de faire face avec succès à la crise la plus grave depuis celle des années
1930.
D’abord, en soutenant la croissance mondiale de façon coordonnée. Les résultats sont là : au début 2009, le
FMI annonçait que la récession se poursuivrait en 2010. Grâce à l’action du G20, le monde a renoué avec la
croissance plus vite que prévu. Et c’est vrai aussi pour la France : le FMI nous annonçait 0,3% ; nous aurons
au moins 1,4% en 2010.
Mais pour sauver durablement l’économie mondiale, il fallait aussi adopter de nouvelles règles pour le
système financier. Des réformes impensables naguère ont été décidées et sont mises en oeuvre : les activités
des fonds spéculatifs sont aujourd’hui régulées ; les agences de notation doivent être enregistrées ; le
versement des bonus dans les banques est encadré par des règles strictes et des malus sont mis en place en cas
de pertes ou de mauvaises performances. Enfin, les paradis fiscaux sont en voie de disparition : 500
conventions d’échange de renseignements en matière fiscale ont été signées depuis le G20 de Londres, le
secret bancaire recule partout dans le monde et des sanctions ont été prises contre les paradis fiscaux qui
n’adoptent pas les nouvelles règles internationales.
Il fallait par ailleurs engager un dialogue pour résorber, dans la durée, les déséquilibres dangereux de
l’économie mondiale : excédents massifs ici, déficits insoutenables là. Ce dialogue a été lancé avec la mise en
place du cadre pour une croissance forte, soutenable et équilibrée au sommet de Pittsburgh. En 2011, il faudra
l’approfondir et l’enrichir ; consolider les mécanismes de coordination ; renforcer la surveillance
multilatérale ; relever le niveau d’exigence pour les engagements pris, avec des mesures concrètes de politique
économique à la clé et un calendrier pour les atteindre.
Au total, le G20 « des temps de crise » a accompli un travail considérable. A vrai dire sans précédent.
Aujourd’hui, alors qu’un calme relatif est restauré, la tentation existe de borner les ambitions du G20 à
l’application des décisions prises, complétée en 2011 par quelques mesures utiles : étendre la régulation dans
les domaines où elle demeure insuffisante ; vérifier la mise en oeuvre des conventions fiscales d’échanges de
renseignement signées depuis le sommet de Londres ; adopter des mesures fortes pour lutter contre la
corruption ; renforcer le mandat du Forum de la Stabilité Financière ; plus largement, revoir le cadre
prudentiel des établissements bancaires pour éviter qu’une crise comme celle que nous avons connue ne se
reproduise.
Sur tous ces sujets, des propositions précises seront sur la table, d’abord pour préparer au mieux le Sommet de
Séoul, puis pour en prolonger les résultats en 2011.
Achever le travail engagé est important, bien sûr ! Il y va de la crédibilité du G20. Mais est-ce suffisant ?
Je le dis tout net : s’en tenir à cet ordre du jour serait condamner le G20 à l’enlisement et le monde à de
nouvelles crises.
Paradoxalement, il était plus facile d’être audacieux lorsque le monde était au bord du précipice et que l’on
n’avait, en réalité, guère le choix. Aujourd’hui, nous avons le choix : achever les chantiers ouverts, traiter à
mesure qu’ils se présenteront les développements imprévus, et borner là notre ambition ; ou bien y ajouter de
nouveaux chantiers, ceux qui sont dans l’impasse depuis trop longtemps et dont dépendent aussi la stabilité et
la prospérité du monde.
La France propose à ses partenaires le choix de l’ambition. Avec une conviction : seul le G20 dispose du
poids spécifique, de la légitimité et de la capacité de décision nécessaires pour donner les impulsions
indispensables à ces chantiers de demain.
Quels sont-ils ? La France va consulter ses partenaires à ce sujet. Pour sa part, elle en identifie trois.
Le premier chantier, c’est celui de la réforme du système monétaire international.
Qui contestera que l’instabilité des changes fait peser une lourde menace sur la croissance mondiale ?
Comment les entreprises peuvent-elles planifier leur production et leurs exportations quand, par exemple,
l’euro passe brutalement de 1 dollar pour 1 euro à 1,60 dollar pour 1 euro, avant de redescendre en quelques
semaines à 1,27 ?
La prospérité de l’après-guerre devait beaucoup à Bretton Woods, à ses règles et à ses institutions. Depuis le
début des années 70, nous vivons dans un non-système monétaire international.
Il ne s’agit pas bien sûr de revenir à un système de taux de change fixes. Ce qui est aujourd’hui souhaitable,
nécessaire même, c’est de mettre en place des instruments pour éviter l’excessive volatilité des monnaies,
l’accumulation des déséquilibres, la recherche d’un niveau toujours plus élevé de réserves de change par les
pays émergents qui ont été confrontés à des retraits brutaux et massifs des capitaux internationaux.
Je sais bien que le sujet est sensible. Et la France compte proposer à ses partenaires de l’aborder sans tabou
mais aussi avec toutes les précautions nécessaires. Pourquoi, par exemple, ne pas commencer par un séminaire
entre les meilleurs spécialistes, qui pourrait peut-être se tenir en Chine ?
Sur le fond, trois pistes pourraient être étudiées :
1- Nous devons d’abord renforcer nos mécanismes de gestion de crise : depuis 1990, les pays émergents ont
connu 42 épisodes de retraits brutaux des capitaux internationaux, mettant en péril leur stabilité et leur
croissance. Nous devons repenser les mécanismes internationaux d’assurance pour disposer d’instruments
multilatéraux plus efficaces et plus rapides pour prévenir et traiter ces crises.
Une réflexion est lancée sur les instruments dont dispose le FMI. La crise financière mais aussi la crise de
l’euro ont montré que pour assurer la stabilité, le monde devait être capable de mobiliser rapidement des
sommes très importantes pour faire face à la spéculation irrationnelle des marchés.
Je souhaite également que nous débattions de la doctrine internationale sur les mouvements de capitaux. Nous
avons vécu des années dans l’illusion que l’ouverture des marchés de capitaux constituait toujours un progrès.
La réalité nous a montré que ce n’était pas le cas. Il est légitime que des pays très dépendants des capitaux
extérieurs puissent prendre, en cas de crise, des mesures pour les réguler. La meilleure assurance contre la
montée des risques protectionnistes, en cette matière comme en d’autres, est l’élaboration de règles
multilatérales.
2- Nous devons ensuite nous interroger sur l’adéquation d’un système monétaire international dominé par une
seule monnaie à un monde devenu multipolaire. C’est un fait : à l’accumulation des réserves de change dans
certains pays correspond le creusement du déficit de la balance des paiements courants des Etats-Unis.
A Londres, les pays du G20 ont décidé d’une allocation exceptionnelle de 250 milliards de Droits de Tirages
Spéciaux. Cet actif international fait aujourd’hui l’objet d’un intérêt croissant. Nous sommes loin de la
création de la monnaie mondiale voulue par Keynes avec le Bancor. Mais offrir un actif de réserve
international qui ne soit pas émis par un seul pays permettrait de renforcer la stabilité du système tout entier.
3- Enfin, nous devons trouver les moyens de mieux coordonner les politiques économiques et monétaires des
grandes zones économiques. Avec le G20, nous avons mis en place à Pittsburgh le cadre qui doit permettre à
chacun d’entre nous de mener les politiques économiques appropriées pour atteindre une croissance élevée et
stable, tout en réduisant les déséquilibres internationaux.
Mais nous devons sans doute aller plus loin et définir un nouveau cadre de concertation sur les évolutions de
change. Ce forum, c’est actuellement le G7 des ministres des finances et des gouverneurs des banques
centrales. Mais comment peut-on aujourd’hui parler de taux de change sans la Chine ? Nous devons débattre
de la meilleure réponse à apporter à cette question incontournable.
Parler de ces sujets n’a rien de sacrilège. En discuter sereinement, au sein du forum le plus légitime et le plus
efficace, le G20, est souhaitable. Nécessaire même. Alors pourquoi attendre ? Et attendre quoi d’ailleurs ?
Une prochaine crise avec, à nouveau, des conséquences incalculables ?
Le deuxième chantier que nous devrions ouvrir est celui de la volatilité des prix des matières premières, dont
témoigne en ce moment même la hausse brutale des cours du blé.
Qui ne se souvient des « émeutes de la faim » à Haïti ou en Afrique quand les prix de certains produits
alimentaires avaient brusquement explosé en 2008 ? Qui a oublié les conséquences dramatiques pour
l’économie mondiale de hausses brutales des prix du pétrole et du gaz, suivies de baisses tout aussi rapides ?
Qui osera dire que le sujet est trop difficile et qu’il vaut mieux ne rien faire ?
La France propose à ses partenaires du G20 d’ouvrir ce dossier avec ambition et pragmatisme. Trois sujets
pourraient être étudiés.
Tout d’abord, il conviendrait de s’interroger sur le fonctionnement même des marchés de dérivés des matières
premières. Pourquoi devrions-nous réguler les marchés de dérivés dans le seul domaine financier ? Etendre la
régulation aux matières premières est possible et souhaitable. Nous limiterons ainsi la spéculation.
Ensuite, pour les matières premières agricoles, plusieurs pistes pourraient être explorées sans a priori : la
transparence des marchés ; les politiques de stockage ; mais aussi la création, par les institutions financières
internationales, d’outils assurantiels pour permettre aux pays importateurs de se couvrir contre la volatilité des
cours.
Enfin, les prix de l’énergie, inscrits à l’ordre du jour du G20 depuis le Sommet de Pittsburgh. La France a reçu
mandat de proposer des mesures pour Séoul et pour le Sommet de 2011, afin de lutter contre la volatilité des
prix. Nous proposerons des mesures de transparence et un dialogue approfondi entre producteurs et
consommateurs pour limiter les fluctuations des cours.
Troisième chantier proposé pour la présidence française du G20 : la réforme de la gouvernance mondiale, dont
je vous ai longuement entretenu ici-même, il y a un an.
Le G20 a décidé qu’il serait le « principal forum » mondial pour les questions économiques et financières.
Encore faut-il qu’il se donne les moyens de travailler plus efficacement. Ne faut-il pas créer un secrétariat du
G20 pour suivre en permanence la mise en oeuvre des décisions prises et instruire les dossiers, en liaison avec
toutes les organisations internationales concernées ?
Ne faut-il pas également que le G20 ouvre son ordre du jour à des sujets nouveaux, tels que le
développement ? Ne devrait-on pas, par exemple, y adopter des règles de bonne conduite et de bonnes
pratiques pour l’aide publique ? Ne devrait-on pas y débattre des financements innovants, et notamment d’une
possible taxe sur les transactions financières ? Ces financements sont indispensables si nous voulons être aux
rendez-vous des objectifs du millénaire et du financement de l’accord de Copenhague sur le changement
climatique.
Ne devrait-on pas, du reste, parler au sein du G20 du financement d’un accord sur le climat ? A un moment où
la lutte contre le réchauffement climatique marque le pas, après la déception de Copenhague et l’enlisement
du processus législatif aux Etats-Unis, il est capital que l’Europe, avec les autres pays développés, tienne les
engagements pris. Il est essentiel que l’accord de Copenhague soit appliqué, qu’il s’agisse du « fast start », des
financements innovants ou de la protection des forêts. Cancun sera une étape importante, mais le moment
décisif pour sceller un accord sera très probablement le sommet de novembre 2011 en Afrique du Sud. Le
Sommet du G20 en France le précédera de peu. Je compte m’entretenir avec le Président Zuma de cette
séquence qui peut être porteuse de progrès décisifs.
La France suggérera aussi un débat plus large sur la gouvernance mondiale. Le G20 a donné une impulsion
décisive à la réforme de la Banque Mondiale ; il devrait faire de même dès les prochains mois avec celle du
FMI. Comment pourrait-il ignorer les institutions spécialisées des Nations Unies qui traitent de l’économie, de
l’emploi, du commerce... Chacune a besoin d’une réforme. Toutes doivent apprendre à mieux travailler
ensemble.
Comment, dans ce contexte, ne pas adresser un signal fort à l’Assemblée Générale des Nations Unies en
faveur d’une réforme intérimaire du Conseil de Sécurité ? Sans cette impulsion décisive, cette réforme,
débattue depuis 20 ans à l’ONU, resterait dans l’impasse longtemps encore.
Je vous ai longuement parlé du G20. Un mot du G8. Certains l’ont dit condamné. D’autres estiment au
contraire qu’il a devant lui un bel avenir, en se recentrant sur les questions de sécurité et son partenariat avec
l’Afrique.
L’avenir tranchera et la France entend préparer soigneusement ce sommet. Il permettra à des dirigeants dont
les vues sont souvent très proches, d’échanger, comme ils l’ont fait en juin au Canada, sur les sujets d’intérêt
commun et les principaux dossiers politiques, de l’Iran au processus de paix au Proche-Orient et à
l’Afghanistan.
Précédé par une réunion des Ministres de l’Intérieur des pays concernés, le sommet débattra aussi de la
déstabilisation des pays de la Caraïbe, de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel par les trafiquants de la drogue
d’Amérique latine destinée à l’Europe. Ensemble, nous voulons couper cette route de la drogue, aider les pays
de transit et protéger les Européens de ce fléau. Nous aurons sans doute à évoquer, dans ce contexte, la lutte
contre Al Qaïda dans la bande sahélienne, de la Mauritanie à la Somalie.
L’autre grand thème du sommet sera le partenariat avec l’Afrique puisque le G8 représente à lui seul 80% de
l’aide publique mondiale. Vous ne serez pas surpris que la France, deuxième donneur d’aide publique au
monde, attache une importance toute particulière à ce partenariat. Le Sommet de Nice et le cinquantenaire des
indépendances ont été l’occasion de confirmer à la fois la force des liens hérités de l’histoire et la rénovation
profonde de notre relation avec tout le continent. Je le soulignerai encore le 20 septembre à New York, à
l’ouverture du sommet sur les objectifs du Millénaire, moment fort de mobilisation.
Lors du G8 de Muskoka, nous avons remis à nos partenaires africains un rapport sur l’exécution des
engagements pris. Le Premier Ministre Mélès d’Ethiopie présentera lors du sommet sous notre présidence un
rapport en miroir sur l’utilisation de l’aide par les Africains. A la lumière de ces deux rapports, nous
réfléchirons ensemble aux moyens les plus efficaces pour mieux aider encore ce continent à réussir son
décollage. Le G8, plus que jamais, doit rester engagé aux côtés de l’Afrique.
Un mot enfin sur l’état d’esprit qui m’animera tout au long de cette année de double présidence. Dites aux
dirigeants de vos pays, qu’ils appartiennent ou non au G20, que la France entend jouer collectif, être à leur
écoute, les consulter aussi souvent que possible. C’est ce que je ferai, par exemple, fin octobre lors du sommet
de la Francophonie à Montreux.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Les thèmes à l’ordre du jour des sommets du G20 et du G8 seront au coeur des travaux de votre conférence. Je
m’en réjouis car, au-delà de la technicité des sujets, une question simple et décisive est posée à nos Etats :
ensemble, sommes-nous capables de bâtir pour tous les peuples, un monde plus sûr, plus prospère, plus juste ?
Je vous remercie."


Source : site d’l’Elysée
Discours du Premier
Ministre, François Fillon
(Paris, 26 août 2010)
Mesdames et Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs
les Ambassadeurs,


Je suis heureux de vous recevoir pour la quatrième fois à Matignon. Malheureusement c’est la première fois
que nous ne pouvons pas le faire dehors. Ceci est dû à la prudence bien connue des collaborateurs du Premier
ministre qui ont exagéré les risques de pluie. Je voudrais après le président de la République et avec lui, vous
dire à mon tour combien je suis reconnaissant du travail que vous effectuez. Les conflits, les tensions
internationales, les catastrophes naturelles ne nous ont pas épargnés : Bagdad, Port-au-Prince, Kaboul,
Bichkek, Téhéran, le monde entier si l’on prend le nuage volcanique islandais, cette année vous avez dû
encore et vous avez su réagir. Je veux avec Bernard Kouchner et Pierre Lellouche, et avec l’ensemble des
membres de mon Gouvernement vous en remercier.
L’universalité et l’efficacité de notre réseau diplomatique sont des atouts majeurs pour permettre à la France
de peser et de rayonner. C’est grâce à lui que la France a été présente sur tous les fronts : pour défendre son
expérience et son exigence environnementale à Copenhague ; pour faire face à la crise financière grecque ;
pour déployer une solidarité exemplaire envers Haïti ; pour venir en appui aux pays menacés par le
terrorisme au Sahel ; pour assurer le succès de la Conférence d’examen du Traité de non-prolifération ; pour
lutter plus efficacement contre la piraterie au large des côtes somaliennes. Avec nos partenaires et avec nos
alliés, nous avons été à l’initiative face aux grandes crises. En me rendant en Afghanistan au mois de février,
j’ai voulu réaffirmer l’engagement de la France aux côtés du peuple et du gouvernement afghans pour les
aider à retrouver la paix et la stabilité. Je l’ai dit à Kaboul : nous n’avons pas l’intention de nous joindre aux
Cassandres qui n’ont autre chose à proposer que la résignation au retour au chaos. Il a fallu - et Bernard le
sait bien - plus d’une décennie pour que les Balkans trouvent le chemin de l’apaisement. La situation afghane
exige de la ténacité et du sang-froid. Notre action en Afghanistan est au service de notre sécurité à tous et je
veux à cette occasion, rendre hommage aux soldats français qui se battent tous les jours pour la garantir,
hélas parfois au péril de leur vie. Mes pensées vont également à nos deux compatriotes Hervé Ghesquière et
Stéphane Taponier retenus en otages et dont la libération continue de nous mobiliser sans relâche.
Le danger que constituerait l’acquisition par l’Iran de l’arme nucléaire est un autre défi majeur pour la
sécurité internationale. La France a été là encore, au centre des efforts diplomatiques. Elle a tenté de renouer
les fils du dialogue dans le cadre du projet de fournitures de combustible pour le réacteur de recherche de
Téhéran. Et quand il a fallu tirer les conséquences de la violation continue de ses obligations par l’Iran, elle a
joué un rôle moteur en faisant adopter des sanctions renforcées par le Conseil de sécurité des Nations Unies,
complétées ensuite par celles de l’Union européenne. Nous l’avons rappelé lors de l’inauguration de la
centrale nucléaire de Bouchehr placée sous le contrôle de l’AIEA : il ne s’agit pas de priver l’Iran de son
droit à développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Il s’agit d’inciter l’Iran à comprendre où le mène
sa fuite en avant.
Enfin, toujours dans cette région troublée du Proche et du Moyen-Orient, la reprise d’un dialogue direct entre
Israéliens et Palestiniens fait naître une lueur d’espoir. Dans ce contexte, j’appelle toutes les parties à faire
preuve de retenue et à éviter sur le terrain les provocations susceptibles de nuire au processus en cours. C’est
valable au Sud-Liban, c’est valable à Jérusalem, c’est valable en Cisjordanie. C’est valable également à Gaza
et au large des côtes de Gaza. Et à cet égard, à la suite des événements dramatiques du 31 mai, je me réjouis
qu’une enquête internationale - dont j’avais demandé l’ouverture dès le lendemain de la tragédie, à
l’Assemblée nationale - ait été lancée par Ban Ki-moon début du mois d’août.
Lorsque nous prenons des initiatives, à l’extérieur comme à l’intérieur de nos frontières, il arrive parfois que
nos actions soient mises en cause à l’étranger. C’est le cas actuellement avec la question des Roms, et je veux
vous dire qu’il est de votre rôle, qu’il est de votre devoir, d’expliquer et de défendre la position française.
Avec le président de la République, nous menons une politique résolue et juste. Nous nous sommes engagés
auprès des Français à tout faire pour renforcer leur sécurité et pour réaffirmer l’autorité de la République. La
France est suffisamment ouverte et suffisamment généreuse pour pouvoir se montrer ferme vis-à-vis de ceux
qui ne respectent pas ses lois. Et c’est la raison pour laquelle j’appelle chacun à la mesure. J’appelle chacun à
ne pas comparer ce qui n’est pas comparable. Gardons-nous des amalgames douteux et des références
historiques mal venues, qui sont une insulte à l’Histoire. La France est une démocratie et avec le président de
la République, nous agissons dans le strict respect de l’Etat de droit. Gardons-nous aussi des grandiloquences
hors de propos de ceux qui, aveuglés par leurs querelles personnelles, en arrivent à dénigrer la France. Le
drapeau de la France n’est pas une banderole sur laquelle on écrit un slogan. Et respecter la France, c’est
aussi respecter le président de la République, élu par les Français. L’intérêt général nous commande de faire
appliquer la loi, de la faire appliquer sans stigmatiser quiconque, mais sans également être complaisant avec
quiconque. Il commande d’allier la tradition humaniste de la France et la nécessité de restaurer des règles afin
d’éviter que notre pacte social ne se fissure.
Les récentes reconduites des Roms dans leur pays d’origine réalisées par notre pays, ont été faites dans le
plein respect du droit européen. La France considère que la seule solution de long terme pour ces citoyens
européens à part entière, réside dans une meilleure intégration économique et sociale, d’abord dans leur pays
d’origine. L’Union européenne doit faire preuve d’une grande solidarité avec les Etats membres concernés, et
en premier lieu avec la Roumanie.
Notre priorité, c’est aussi de nous préoccuper du sort des enfants Roms. Beaucoup d’entre eux sont exploités
par des filières criminelles. C’est une situation qui est inacceptable dans l’Union européenne. Et tous les Etats
membres doivent avoir à coeur de coopérer pour lutter avec détermination contre ces filières et pour assurer
des conditions d’exigences dignes aux enfants Roms. Je viens à l’instant même de m’entretenir de ce sujet
avec le président de la Commission, José- Manuel Barroso, et nous sommes convenus que dans les tout
prochains jours, une réunion de travail, entre les ministres et les commissaires concernés, aurait lieu sur ce
sujet.
Mesdames et Messieurs, notre double présidence du G20 et du G8 est unique dans l’histoire et elle nous
oblige à faire preuve d’audace et d’innovation. La présidence française du G20 devra plus que jamais faire
bouger les lignes en matière de régulation et de gouvernance mondiales. C’est tout le sens de la feuille de
route que vous a fixée hier le Chef de l’Etat. C’est une feuille de route qui est ambitieuse. Nous l’avons tous
ressenti en l’entendant. Mais pouvons-nous, après la crise que nous venons de connaître, nous montrer
hésitants ou pire, nous montrer résignés ? Pouvons-nous accepter que notre pays laisse une situation dont
nous voyons tous qu’elle peut conduire à de nouvelles catastrophes.
La France est une puissance politique, c’est une puissance qui au-delà de ses atouts économiques ou de ses
intérêts immédiats, défend des valeurs qui sont des valeurs universelles. Il est de notre devoir, il est de notre
tradition de penser le monde de demain et d’agir pas à pas pour ordonner ses forces contradictoires. Depuis
trois ans, Nicolas Sarkozy s’y emploie, et je suis fier de constater que la voix de notre pays est écoutée. Sur
les priorités françaises, vous devez être en première ligne pour relayer nos messages et nourrir notre réflexion
collective. Cette présidence, nous allons l’assurer en cohérence avec notre action européenne, en oeuvrant
pour une Europe politique plus solide.
L’année 2008 avait été marquée par le succès de la Présidence française, l’année 2009 par la ratification du
Traité de Lisbonne. La première partie de l’année 2010 marquera les mémoires par la gravité de la crise qui a
touché la dette souveraine de certains Etats membres. Cette crise a soumis la Zone Euro à d’extrêmes
tensions. Certains ont même parlé un peu rapidement de risque d’éclatement. L’onde de choc de la crise a
évidemment largement dépassé les frontières de la Zone euro et au début de l’été, j’ai eu l’occasion de me
rendre à Tokyo pour rassurer les investisseurs japonais sur la stabilité et sur la solidité de la Zone euro.
Une nouvelle fois, l’Europe a fait taire les sceptiques. Une nouvelle fois, l’Europe a su faire face à la crise,
comme elle l’avait fait sous la présidence française. Et une nouvelle fois, l’Europe s’est aperçue qu’elle avait
les solutions à sa disposition, mais que tout dépendait de la volonté politique des Etats membres. La France et
l’Allemagne ont eu cette volonté politique. Je veux vous dire que la concertation a été constante entre nos
deux pays.
Il faut bien comprendre que le débat public provoqué dans toute l’Europe - et particulièrement entre la France
et l’Allemagne - par la gestion de la crise de la dette souveraine, a porté sur des questions extrêmement
sensibles. Et parce qu’elles étaient sensibles, ces questions avaient été laissées dans le flou depuis l’origine,
depuis la création de l’euro. Quel est le degré de solidarité et d’organisation minimale entre les Etats
membres d’une même zone monétaire ? Quel est le meilleur moyen d’imposer à tous le respect indispensable
de la maîtrise des finances publiques ? Comment venir en aide à des Etats en grave difficulté sur leur dette
souveraine, sans contrevenir à la règle du « non renflouement » et sans les déresponsabiliser ? Eh bien, en
quelques semaines, Allemands et Français ont su trouver des réponses à ces questions, qui se sont toutes
posées en même temps. Un plan d’aide à la Grèce de 110 milliards d’Euros adopté en un temps record ; 750
milliards d’Euros prévus pour garantir la dette des autres Etats de la Zone Euro. Et parallèlement, Français et
Allemands ont formulé des propositions communes pour mieux faire respecter la surveillance budgétaire en
Europe, pour l’étendre à la fois à l’évolution de la dette et aux écarts excessifs de compétitivité entre Etats
membres. Observer une discipline budgétaire, c’est évidemment indispensable si on veut éviter un
endettement public qui serait fatal à nos perspectives de croissance et à la confiance des marchés. Mais en
même temps nous savons bien que cette discipline n’est pas suffisante et en Europe, la question centrale c’est
bien celle de notre décrochage économique par rapport à l’Amérique et surtout par rapport aux grands pays
émergents, dont les perspectives de croissance sont beaucoup plus fortes.
Sur le long terme, nous faisons face à un risque de marginalisation, qui exige de nous un effort massif en
faveur des industries et des services d’avenir. Bien entendu, c’est d’abord aux Etats d’y répondre. Mais une
action européenne d’appui à la croissance est aussi absolument indispensable. Et elle l’est d’autant plus que
beaucoup d’instruments de politique économique ont été transférés à Bruxelles et peuvent avoir un impact
réel. Je pense à la politique commerciale, aux accords d’investissements ou à l’ouverture réciproque des
marchés publics. Je pense aussi à la politique de change pour les pays membres de la Zone Euro, ou à la
politique de concurrence. Les politiques européennes doivent pouvoir mieux contribuer à la croissance et à
l’emploi. Si l’on prend l’exemple de la Recherche et de l’Innovation, il ne faut pas se faire d’illusion, avec le
renforcement de la discipline budgétaire en Europe on ne peut pas attendre d’augmentation substantielle du
budget de l’Union Européenne. Et pourtant, il faut en même temps trouver les moyens de mieux financer
l’innovation en Europe. La France propose de « mieux dépenser » les crédits européens en faisant contribuer
le budget communautaire à un grand « Fonds européen de capital-risque » qui s’adresserait en priorité aux
PME innovantes, et en créant un « Fonds européen des brevets », sur le modèle de ce qui se fait déjà en Asie
et en Amérique à grande échelle.
En matière de stratégie économique européenne, la France défend une vision ambitieuse du programme «
Europe 2020 ». Il faut bien sûr un volet national, mais il est indispensable de réorienter les politiques
européennes elles-mêmes. Et cette réorientation est particulièrement nécessaire dans le domaine externe,
maintenant que l’Union européenne est en train de construire un véritable service d’action extérieure et
dispose dans les pays tiers de « délégations de l’Union ». La politique commerciale, la politique de
développement, la politique de voisinage, la politique étrangère de l’Union doivent devenir plus cohérentes et
elles doivent surtout mettre en oeuvre les mêmes priorités stratégiques défendues par le Conseil européen.
Mesdames et Messieurs, l’Europe reste indubitablement le cadre de notre prospérité, mais il revient à chacun
de ses Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour assurer sa croissance. Et je voudrais vous dire
à cet égard, que force est de constater que l’économie française a mieux résisté que l’ensemble de ses voisins
et a redémarré plus rapidement. La France n’a pas accumulé de déséquilibres financiers majeurs dont
souffrent encore certains de ses partenaires : l’endettement des ménages est sensiblement inférieur à celui des
autres pays européens, la structure financière de nos entreprises est saine, les excès sur le marché immobilier
ont été circonscrits et le choc subi sur le secteur financier a été réduit parce que les banques françaises étaient
suffisamment capitalisées comme l’ont d’ailleurs démontré les résultats des stress tests publiés il y a quelques
semaines.
En France, la récession a été limitée à moins 2,5% en 2009, contre près du double en Allemagne, au
Royaume-Uni ou en Italie. La croissance de plus 0,6% au 2ème trimestre, en hausse pour le cinquième
trimestre consécutif, confirme que nous sommes en phase d’une reprise progressive de l’activité et que notre
politique économique est pertinente. Et je veux vous dire que ce chiffre permet d’escompter que notre
prévision de croissance de plus 1,4% pour 2010 sera atteinte, voire même dépassée. Et qu’en 2011, nous
pouvons nous fixer raisonnablement un objectif de croissance à 2 %. Notre priorité aujourd’hui est triple.
Nous devons renforcer notre compétitivité, poursuivre les réformes structurelles et en même temps redresser
nos finances publiques.
Tenir notre rang dans une concurrence internationale impitoyable est un vrai défi. En 2009, vous savez que la
Chine a détrôné l’Allemagne comme premier exportateur mondial et est devenue le deuxième pays d’accueil
des investissements étrangers. Elle est désormais le pays où l’on dépose le plus de brevets au monde. Cette
année, sa croissance sera supérieure à 10%, celle de son voisin indien avoisinera les 8%. Dans ces conditions,
le protectionnisme n’est évidemment pas une réponse valable. C’est au contraire la croissance des
importations des pays émergents et notamment des pays asiatiques qui a permis de sortir plus rapidement de
la récession en 2009.
Notre responsabilité, c’est de faire en sorte que les pays développés soient capables dans les prochaines
années, de maintenir leur avance technologique en innovant constamment. Pour cela, il faut savoir s’associer.
C’était l’un des objectifs de ma visite en Chine en décembre dernier, ce qui a permis de franchir de nouvelles
étapes dans nos partenariats aéronautiques et nucléaires.
A l’intérieur de la Zone Euro également, nous devons préserver notre compétitivité et notamment face à
l’Allemagne. A lors que les exportations françaises représentaient 55% des exportations allemandes en 1999,
elles ne s’élèvent plus qu’à 40% en 2008. Pour atteindre ces objectifs nous nous sommes fixés une stratégie
économique double, fondée d’un côté sur la discipline budgétaire et de l’autre sur les investissements. Nous
avons fait clairement le choix de maîtriser notre déficit public qui s’élève à 8 % du Produit Intérieur Brut.
Nous avons lancé un plan d’action destiné à le ramener à 6 % en 2011, et 3% en 2013. Cela représente une
réduction du déficit de 40 milliards d’euros dès le budget prochain de 2011 et de 100 milliards d’euros d’ici
2013. Mais parallèlement, nous avons mobilisé l’ensemble des outils de la politique économique pour asseoir
notre compétitivité et pour investir dans l’avenir. Le président de la République évoquait hier la
défiscalisation des heures supplémentaires ; l’autonomie des universités ; la suppression de la taxe
professionnelle ; la stimulation de l’investissement avec un système de crédit-impôt recherche, dont tout le
monde nous dit qu’il est le meilleur de tous les pays de l’OCDE. Ce qui me permet d’ailleurs de dire au
passage qu’on ne va pas modifier un système qui est le meilleur de tous les pays de l’OCDE, au moment
même où nous avons besoin de booster l’investissement dans la recherche. Et nous avons lancé un grand
programme d’investissement d’avenir qui consacre 35 milliards d’euros à l’enseignement supérieur, à la
formation, à la recherche, à l’innovation ; en particulier au réacteur nucléaire de 4ème génération et aux
réseaux de communication à haut débit. Avec l’effet de levier des autres financements privés, l’effort total
d’investissement sur les technologies d’avenir va tourner autour de 60 milliards d’euros, en plus de tous les
projets déjà existants. Je pense qu’on peut dire que depuis deux décennies, jamais un gouvernement n’a
autant misé et investi sur le futur.
Et puis la France continue de se réformer. Dans les prochaines semaines, la réforme de notre système de
retraites sera votée par le Parlement. Vous le savez, elle vise un relèvement de l’âge légal de la retraite de 60
à 62 ans dès 2018, et le report de l’âge maximal auquel on pourra toucher sa retraite à taux plein de 65 à 67
ans. Certains disent que c’est un effort « insupportable ». Je veux leur répondre que cet effort est raisonnable.
Qu’il est raisonnable au regard de notre démographie et de nos déficits. Et je compte sur le bon sens des
Français pour ne pas se laisser abuser par ceux qui prétendent qu’on peut sauver nos retraites sans travailler
plus longtemps. D’autres jugent cet effort « insuffisant » au regard de ce qui existe chez certains de nos
voisins. A ceux-là, je veux répondre que la mise en oeuvre de nos mesures sera extrêmement rapide : le
relèvement des seuils envisagé est deux à quatre fois plus rapide qu’en Allemagne, qu’au Royaume-Uni ou
qu’aux Etats-Unis.
Toutes ces réformes, Mesdames et Messieurs, sont essentielles pour préserver notre modèle social, pour
permettre que nos entreprises continuent à créer des emplois sur notre territoire, mais aussi pour garantir
l’attractivité de notre pays. En France, un quart des salariés dans l’industrie travaille pour des filiales de
groupes étrangers et ce n’est pas un hasard si l’année dernière, la France a été la seconde destination en
Europe pour les nouveaux projets créateurs d’emplois. La France est le premier pays européen pour
l’implantation de centres de Recherche et de Développement de groupes étrangers. Aujourd’hui, créer une
entreprise en France, contrairement à ce que cela a été pendant très longtemps, nécessite moins de procédures
administratives qu’au Royaume-Uni ou qu’aux Etats-Unis.
Dans une compétition économique internationale qui se joue aussi sur le terrain de la communication, je
compte sur vous pour valoriser cette France qui se réforme, cette France ouverte et moderne et donc pour tuer
tous les canards, toutes les vieilles visions dépassées de notre pays.
Au moment où la croissance de l’économie mondiale redémarre, les pouvoirs publics sont là pour aider les
entreprises françaises à être au rendez-vous et en particulier sur les marchés émergents. C’était tout l’objectif
de ma visite au Vietnam à l’automne dernier. Certains signes sont encourageants. Nos exportations ont
rebondi au premier semestre, et le nombre d’entreprises exportatrices qui baissait depuis plusieurs années,
augmente à nouveau. J’y vois notamment un effet de la réforme du dispositif de soutien à l’export qui a été
engagée par Christine Lagarde et par Anne-Marie Idrac, auxquelles je voudrais à toutes d’eux rendre un
hommage particulier pour leur engagement sur le plan international, c’est évidemment le rôle d’Anne-Marie,
qui fait un travail formidable dans ce sens.
Nous devons aussi savoir tirer les leçons de nos échecs. Dans le domaine nucléaire, après le revers que nous
avons enregistré aux Emirats arabes unis, et suite au rapport que nous avions demandé à Monsieur Roussely,
nous avons remis en ordre de bataille la filière nucléaire française. Nous voulons la positionner mieux sur les
marchés à l’export, et c’est notamment dans ce but que je me suis rendu en Jordanie. Au moment où le
monde entier cherche à réduire ses émissions de CO2, le nucléaire est plus que jamais un secteur d’avenir, et
l’unité de la filière française autour de ses champions nationaux est primordiale, comme l’a rappelé le
président de la République au dernier Conseil de Politique nucléaire.
Enfin au-delà de la promotion de notre industrie, il s’agit aussi d’assurer notre sécurité énergétique et la
diversification de nos approvisionnements. C’est tout le sens de notre coopération avec de grands partenaires
comme la Russie ou comme la Norvège, que j’ai souhaité renforcer cette année.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, la maîtrise de nos finances publiques s’applique à tous. Comme
les autres structures de l’Etat, le Quai d’Orsay contribue depuis des années à cet effort. Je sais combien la
Révision générale des politiques publiques vous mobilise, et je sais combien elle suscite des interrogations et
des inquiétudes quant à l’avenir de notre action et de ses moyens. Je veux vous dire que je suis convaincu de
la nécessité pour notre pays, dans un monde de compétition, de continuer à disposer d’un outil diplomatique
performant. Et les réformes engagées depuis plus de trois ans, sous la direction et grâce à la détermination de
Bernard Kouchner, montrent avec quelle efficacité le ministère des Affaires étrangères a su changer ses
méthodes de travail et son organisation pour répondre à cette exigence. Ces réformes permettent non
seulement de préserver l’universalité de notre réseau, mais aussi de garantir le rôle pilote du ministère dans la
conduite de la politique extérieure de la France. Et à cet égard, je veux saluer l’adoption le mois dernier, de la
loi relative à l’action extérieure de l’Etat. Elle va permettre de renforcer la présence et l’influence de la
France à l’étranger dans le domaine de la culture, de la mobilité étudiante et de l’expertise. Avec la création
de trois nouveaux opérateurs - l’Institut français qui sera présidé par Xavier Darcos, CampusFrance et France
Expertise internationale - et en pleine association avec les autres ministères concernés, c’est bien le Quai
d’Orsay, Monsieur le Ministre, qui exercera le pilotage de ces politiques publiques décisives pour
promouvoir notre langue, pour promouvoir notre création artistique, pour promouvoir nos industries
culturelles, nos idées, nos savoirs et pour nous propulser dans la bataille mondiale de ce qu’on appelle le «
soft power ». Pour la première fois, l’autorité des Ambassadeurs sur les activités des opérateurs de l’action
extérieure de l’Etat reçoit une reconnaissance législative. Avec ces trois établissements, notre dispositif de
coopération, déjà doté d’opérateurs efficaces pour l’enseignement du français, pour l’audiovisuel extérieur et
pour l’aide au développement, est complété et parachevé. La volonté du Gouvernement, c’est de donner à la
réforme qui vient d’être votée, les moyens de réussir.
En dépit d’une situation budgétaire que vous imaginez extrêmement tendue - la vérité c’est qu’on n’a jamais
fait un effort de réduction de la dépense publique aussi fort que celui que nous allons réaliser - j’ai donné
mon accord au ministre pour que la rallonge exceptionnelle, qui avait été accordée dès 2009, pour la
réorganisation de notre diplomatie culturelle soit pérennisée pour les trois prochaines années. Les crédits
pour la sécurité de nos personnels et de nos implantations seront à nouveau augmentés dès cette année et, je
le veux le dire, si nécessaire, les années suivantes. L’aide au développement, l’aide à l’Afghanistan et au
Pakistan, les bourses scolaires, l’aide sociale pour les Français en difficulté seront consolidées en 2011.
J’ai veillé enfin à ce que la règle du non remplacement d’un départ sur deux à la retraite s’applique au Quai
d’Orsay, en tenant compte de la part minoritaire des diplomates de carrière dans l’ensemble des emplois pris
en charge par votre ministère. Mon objectif, c’est que les réductions d’effectifs décidées pour la deuxième
phase de la RGPP préservent le coeur du réseau diplomatique et consulaire.
Je crois, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, au rôle singulier de la France dans le monde.
L’isolationnisme, le protectionnisme, le nationalisme étroit ne peuvent qu’étouffer nos ambitions. Votre
professionnalisme et votre dévouement, votre courage aussi pour beaucoup d’entre vous qui exercez ce
métier dans des conditions extrêmement difficiles, doivent être salués. C’est vous qui au quotidien, défendez
les intérêts et l’image de la France sur la scène internationale. C’est une tâche exigeante, c’est une tâche
difficile, mais je veux vous dire c’est une tâche qui prolonge la noblesse d’une Nation ancienne et respectée
et qui exige le meilleur de vous-mêmes.
Je vous remercie.


(source : site Internet du Premier ministre)
Discours d’ouverture du Ministre des Affaires
étrangeres et europeennes, Bernard Kouchner
(Paris, 26 août 2010)
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Directeurs généraux,
Monsieur le Secrétaire général,


Avant de très brièvement vous présenter le programme des deux prochains jours, je veux d’abord vous dire
mon plaisir d’être avec vous et le contentement particulier que j’ai éprouvé hier alors que la Conférence
n’était pas vraiment commencée, puisque nous avions rendez-vous à l’Elysée pour écouter le discours du
président. Mais nous avons déjà organisé quelques tables rondes, hier, ici, rue de la Convention et peut-être
que dans ces nouveaux bâtiments, le dialogue et les échanges sont plus faciles que sous les dorures du Quai
d’Orsay.
En tout cas, je considère que cette rencontre est déjà réussie, après avoir participé à une série d’échanges à
propos d’un sujet difficile, tout à fait important, celui de la Turquie, de son rapport avec l’Union européenne
mais également avec son environnement régional, le Moyen-Orient. Nous avons parlé du rôle de la forte
diplomatie turque que l’on rencontre aux quatre coins du monde. J’ai trouvé cela passionnant parce que les
ambassadeurs qui connaissent le terrain, et pas seulement les spécialistes, parlaient de façon très sincère ;
chacun a éclairé la discussion à partir de son expérience dans son pays de résidence. Pour moi, c’est une
ouverture, une véritable respiration, que de parler ainsi.
Je suis très heureux d’être avec vous, je vous connais pratiquement un par un. A quelques exceptions près, et
je suis désolé qu’elles subsistent, je vous ai rendu visite sur place. J’ai eu l’occasion de profiter de vos
expériences et de vos analyses dans les pays où vous nous représentez. J’ai un souvenir très précis de
dialogues avec vous. Je voudrais donc que ces expériences de rencontres se traduisent par un
enrichissement, ici, à Paris.
Je vais vous proposer une petite méthode pour que la compréhension intime et irremplaçable que vous avez
de vos pays de résidence nous soit transmise plus fréquemment. Je souhaite maintenir nos rencontres
régionales qui souvent sont décalées ; les uns et les autres étant pris par des urgences, cela n’est pas toujours
facile. Vous retrouver est un bonheur et il faut davantage de contacts, de rencontres et d’échanges. Je veux
vous voir, vous entendre et je souhaite que l’on vous écoute plus. Ce que je veux, en somme, c’est une
conférence des ambassadeurs toute l’année. Je ne vous demande pas d’être à Paris en permanence, mais
n’attendons pas un rendez-vous annuel pour nous parler comme cela. Aménageons ce dialogue permanent
entre nous.
Vous êtes aux quatre coins du monde ? Instaurons de manière régulière, une fois par mois, des
vidéoconférences régionales. On a essayé de le faire à l’échelle internationale. A chaque fois que cela fut
possible techniquement, ce fut très profitable.
Je voudrais aussi échanger plus fréquemment avec vous sur des sujets thématiques. Nous avons été très
satisfaits et inspirés par vos contributions au travail de la direction de la Prospective sur les évangélistes.
Nous avons reçu 110 réponses et j’en suis vraiment très satisfait, tout comme je le suis de l’étude sur
laquelle vos contributions ont débouché. Je souhaite que nous poursuivions cette expérience et, dorénavant,
je vous proposerai un sujet par mois pour provoquer vos réponses autour des travaux menés par la direction
de la Prospective, dont Joseph Maïla, secondé par Christian Lechervy, prendra la direction à compter du 1er
septembre. Marie Mendras pourra continuer à nous faire bénéficier de son talent et de ses compétences dans
un autre cadre, très proche.
C’est dans cet esprit que nous travaillerons ensemble pour porter cette diplomatie ouverte que j’appelle de
mes voeux, une diplomatie à l’écoute de nos partenaires étrangers. C’est beaucoup plus difficile maintenant,
car nos partenaires significatifs se multiplient. Je tiens comme très important ce geste qui, le même jour, a
consisté, d’un côté, à la signature d’un accord entre le Brésil, la Turquie - deux pays significatifs - et l’Iran,
au moment même où les cinq membres permanents déposaient sur la table du Conseil de sécurité des
Nations unies le document sur les sanctions. C’est un moment décisif, cela n’a pas eu une portée aussi
importante que le souhaitaient les trois signataires de Téhéran, mais c’est significatif du changement des
temps.
Je veux rendre hommage à votre aptitude à suivre et comprendre les évolutions, à décrypter les attentes et ce
n’est pas facile. Faire entendre la France, avoir un suivi de l’écoute de la France, ce n’est pas facile. Bien
sûr, chacun s’interroge. Dans les pays que j’ai fréquentés, pendant ces trois ans et demi, il y avait une
attente. On nous attribue d’avance des vertus que nous n’avons pas toujours quant à l’analyse du monde et
quant aux propositions que nous pouvons faire, dans tous les endroits de ce monde. Décrypter ces attentes,
c’est votre rôle et vous le faites très bien. Tâchons, nous-mêmes, à Paris, de décrypter vos attentes et de vous
écouter davantage.
Cette année, nous avons souhaité organiser la Conférence autour de l’événement majeur que constituera la
présidence française du G8 et du G20, avec un programme extrêmement ambitieux qu’il nous faudra
nourrir, suivre et faire aboutir. Nous avons longuement entendu le président de la République à ce propos.
C’est une ambition fondée sur l’expérience, en particulier sur l’expérience de la présidence française de
l’Union européenne. Nous n’avons honnêtement pas été mauvais, nous avons fait face à toutes les crises. Il y
en a eu deux majeures : la Géorgie et la crise économique. Vous avez poursuivi de bonne manière cette
présidence française. Nous en sommes encore là. Hier, le président de la République disait fort bien que
nous avions le suivi, le secrétariat, tout ce qui devra être organisé autour de la présidence française du G8 et
du G20.
Nous y reviendrons dans quelques instants à travers les échanges que nous aurons avec Bruno Le Maire,
Pascal Lamy, Angel Gurria, puis avec Jean-Louis Borloo, Eric Woerth, Juan Somavia, Xavier Musca et
Christian de Boissieu.
Avec notre présidence, qui intervient dans un contexte historique, qui impose une réforme de la
gouvernance mondiale, s’ouvre le moment qu’il nous appartient de rendre décisif. C’est notre responsabilité,
c’est là qu’on nous attend. C’est aussi une formidable opportunité pour la France de proposer à ses
partenaires "le choix de l’ambition" auquel le président de la République nous a appelés hier.
Dans vos pays de résidence, y compris ceux qui ne font pas partie du G20 - ce serait une belle erreur de nous
borner aux pays du G20 - il faut donner à ce cénacle des pays les plus riches du monde une ambition
beaucoup plus large, de prendre à bras le corps un certain nombre de ces problèmes qui concernent
l’ensemble de la communauté internationale. C’est à votre familiarité des pays et des sujets, à votre
inventivité, à vos propositions auxquelles nous ferons appel, sur la manière de traiter les sujets énumérés
hier par le président de la République. Dans chacun de ces pays : méfiance, idées, réalisation, nous avons
besoin de vous pour cela. Et, permettez-moi de le mentionner - mais ce n’est pas qu’anecdotique -, c’est ici
que cela se passera ; l’immense majorité des réunions ministérielles qui commenceront à partir de la fin de
l’année se feront dans ce centre de conférences. Vous êtes au coeur géographique de l’approche des
sommets.
***
J’en viens maintenant plus précisément au programme. Je vous réserve quelques surprises dans le discours
final de demain. Je répondrai probablement à quelques critiques, un peu répétées, quelquefois un peu
lourdes mêmes, qui m’ont visé personnellement. Je vous dirai comment j’ai combattu pour la survie de cette
institution. On pourrait comparer avec d’autres ministères. La critique est facile, mais l’art, ô combien
difficile. C’est facile de dire qu’il faut trouver beaucoup d’argent dans une période comme la nôtre. Cela ne
concerne pas que le Quai d’Orsay et la diplomatie, au contraire, nous avons été bien mieux traités...
Les membres de la table ronde animée par Christian Masset réfléchiront sur le changement climatique,
l’environnement, la gestion et le financement des "biens publics mondiaux".
La réforme du système monétaire, la régulation financière et celle des marchés agricoles et des matières
premières seront au centre des débats modérés par Cyrille Pierre et Philippe Chalmin.
Pour la sécurité et la gestion des crises, à travers les questions de la difficile conciliation entre paix, sécurité
et droits de l’Homme, il y aura, je l’espère, grâce à François Zimeray, notre ambassadeur pour les droits de
l’Homme, et à son travail, un débat, et vous aurez bientôt le texte sur une sorte de traité des droits de
l’Homme à l’usage des ministères, en particulier le nôtre. Cette table ronde sera animée par Sylvie Bermann.
Une autre table ronde portera sur la coordination des efforts de la communauté internationale en
Afghanistan, à laquelle j’aimerais bien participer, animée par Jacques Audibert.
Les relations avec les pays émergents feront l’objet des débats conduits par Paul Jean-Ortiz et Elisabeth
Beton-Delègue.
Concernant la coopération au développement, les participants de la table ronde animée par Georges Serre
présenteront la stratégie française et européenne de développement. Là aussi ce n’est pas facile. En période
de vache maigre, ne nous dissimulons pas derrière notre petit doigt en disant qu’il en faut plus. Il en faut
plus en ce moment au Pakistan, que fait-on ? Regardez les chiffres des participations des pays européens par
rapport à la France, nous n’avons pas à rougir, mais certains font un plus gros effort. Comment peut-on
trouver une meilleure manière d’aider le Pakistan en ce moment ? Nous avons rendez-vous le 10 septembre
au Gymnich, au Conseil européen des Affaires étrangères. Comme il y a un département pakistanais qui
oriente et dirige l’aide internationale, c’est avec eux que nous avons rendez-vous et avec le ministre
pakistanais des Affaires étrangères. Il faut que nous trouvions une manière d’intervenir plus fortement avant
ce 10 septembre.
Le rôle de l’Union européenne, après le Traité de Lisbonne et la mise en place du Service européen d’action
extérieure, seront abordés par Pierre Lellouche et Poul Christoffersen.
Nous nous devions d’adapter nos structures, nos outils et notre réflexion à ces grandes évolutions et à ces
défis, à ces surprises, à ces urgences permanentes. C’était tout le sens de la réforme du ministère que nous
avons engagée. Je ne reviendrai pas sur cette réforme que je vous avais exposée l’an dernier et que vous
vous êtes désormais appropriée.
Cette année, vous le savez, nous avons consacré beaucoup de notre temps et de notre énergie à la réforme du
"soft-power" français, qui a été l’un de nos grands chantiers et sans doute le plus difficile. Tout le monde ne
m’y a pas aidé. Il fallait convaincre les agents de ce ministère et je pense les avoir convaincus. Mon objectif
était de doter notre pays d’opérateurs modernes et efficaces pour accroître son rayonnement et notre
influence à l’étranger. A l’heure où de plus en plus de sujets sont traités au niveau européen, la culture
demeure l’un des rares champs relevant du niveau national. Je parlais du Service extérieur de l’Europe, il
n’inclut pas la culture. Nous sommes encore responsables de cela alors que la demande est grande,
immense. Il faut, plus que jamais, lui donner les moyens de sa légitime ambition. La culture française est
demandée partout.
Je reviendrai vendredi, avec Xavier Darcos, le président de l’Institut français, sur la création de cet institut et
l’évolution de notre réseau. Je peux vous assurer que cette réforme est bonne pour nous tous, pour notre
réseau. Ne croyez pas que vous êtes à l’abandon, au contraire ! Vous êtes plus que jamais responsables, avec
la reconnaissance inscrite dans la loi de l’autorité de l’ambassadeur sur les opérateurs de l’action extérieure
de l’Etat. Ce n’était pas une loi, c’est une première ! Les préfets n’ont pas cette chance s’agissant des
établissements publics sur le territoire national.
Réformer nos méthodes et nos moyens, c’est aussi et d’abord pouvoir disposer de moyens de
communication sûrs et sérieux. A cet égard, je voudrais remercier Nicolas Warnery et Patrick Pailloux pour
la présentation qu’ils vous feront demain sur la sécurité des systèmes d’information.
Je remercie aussi Michèle Ramis-Plum et Edgar Grospiron qui nous sensibiliseront aux enjeux de la
candidature d’Annecy aux Jeux Olympiques d’hiver de 2018. Mesdames et Messieurs, il me reste à vous
souhaiter d’intenses et fructueux échanges. Je vous laisse quelques instants de pause et nous allons
commencer la première table ronde dès que tous nos invités seront arrivés. Encore une fois, bon travail, cela
a déjà commencé et je ne doute pas que de grandes idées sortiront des ces débats.
Je vous remercie.


Intervention de Eric Besson,
Ministre de l’immigration, de
l’intégration, de l’identité
nationale et du développement
solidaire
Conférence des ambassadeurs
Intervention de M. Eric BESSON
Ministre de l’immigration, de l’intégration,
de l’identité nationale et du développement solidaire
Monsieur le ministre,
Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs,


Je suis heureux de vous retrouver pour ce rendez-vous traditionnel. C’est pour moi l’occasion de vous
présenter les principaux enjeux et les orientations de la politique d’immigration, d’asile et de
développement solidaire. Mais je souhaiterais surtout vous adresser un message de mobilisation, car votre
contribution à cet important volet de l’action extérieure de la France est essentielle.
1. Permettez-moi tout d’abord de vous rappeler combien les migrations sont au coeur des grandes
dynamiques et des défis du monde contemporain.
Avec plus de 200 millions de migrants, 12 millions de réfugiés et des revenus de la traite des êtres humains
et du trafic de migrants atteignant le 2ème rang des trafics illicites dans le monde selon l’ONU, les flux
migratoires constituent un enjeu planétaire. Un enjeu qui recoupe l’ensemble des principaux domaines de
notre action extérieure : la lutte contre la pauvreté, la sécurité, la solidarité internationale,l’attractivité de
notre pays, l’avenir de la gouvernance mondiale.
2. C’est dans ce contexte que la France honore chaque jour sa tradition d’humanisme, celle d’un pays
ouvert et généreux, attaché à l’accueil des étrangers.
En 2009, nous avons délivré 1.850.000 visas et 174.000 titres de long séjour. 50.500 nouveaux étudiants
étrangers ont rejoint nos établissements d’enseignement supérieur. 110.000 naturalisés ont intégré la
communauté nationale. La France s’illustre aussi en étant le premier pays européen et le deuxième au
monde pour l’accueil des demandeurs d’asile, juste derrière les Etats-Unis.
Je voudrais vous parler très directement : ceux qui décrivent la France comme une forteresse racontent des
histoires. 80% des demandes de visas reçoivent une réponse favorable. 1 demandeur d’asile sur 3 se voit
octroyer la protection internationale. Je vous demande de ne rater aucune occasion de porter ces faits et ces
chiffres à la connaissance de vos interlocuteurs, au plan bilatéral comme dans les différentes enceintes
internationales.
3. Pour demeurer un pays d’accueil, ouvert et généreux, nous devons également agir avec une
détermination sans faille contre les filières criminelles qui organisent la traite des êtres humains et le trafic
de migrants.
Cette fermeté, partagée par l’ensemble des pays européens, n’est ni de droite ni de gauche. Elle répond à
deux préoccupations essentielles pour l’avenir de notre pays et celui de l’Union Européenne :
La lutte contre l’immigration clandestine est indispensable pour mener une politique d’intégration efficace
des migrants légaux qui ont choisi notre pays et dont nous avons besoin. Quand le taux de chômage des
étrangers régulièrement installés en France est près de trois fois supérieur à la moyenne nationale, comment
imaginer mettre en oeuvre une politique d’insertion professionnelle sans maîtrise des flux migratoires ?
Nous ne pouvons pas tolérer que le formidable acquis de l’espace Schengen soit détourné, et donc remis en
cause, par l’action de mafias qui tirent profit de l’exploitation de migrants. L’Europe de la libre-circulation
des personnes ne doit pas devenir l’Europe des passeurs.
Au plan européen, l’année écoulée a été marquée par l’adoption, à l’initiative de la France, d’une feuille de
route pour la mise en place d’un système européen de gardes frontières. Ce noyau de police européenne
pour la surveillance de nos frontières extérieures s’appuiera sur le renforcement de l’agence FRONTEX,
qui sera dotée de compétences élargies et de nouveaux moyens opérationnels.
Au niveau national, 145 filières (+44%) ont été démantelées et 4.734 trafiquants (+10%) ont été interpellés
par les services de police en 2009. Notre mobilisation doit désormais porter tout autant sur la coopération
opérationnelle avec les pays d’origine et de transit. Dès le mois de septembre, en étroite concertation avec
les ministres des affaires étrangères, de l’intérieur et de la défense, nous nous doterons d’un plan d’action
national pour y parvenir. J’ai également proposé à nos principaux partenaires européens, ainsi qu’aux Etats-
Unis et au Canada, de coordonner notre dialogue avec les pays tiers et de mutualiser nos moyens d’action.
La première réunion de cette « task-force » se tiendra les 21 et 22 octobre prochain à Paris.
Votre contribution à l’effort de lutte contre l’immigration clandestine est nécessaire :
D’abord en matière de délivrance des visas, pour laquelle vos prérogatives doivent s’exercer autant pour
faciliter la circulation des personnes contribuant au développement de nos relations bilatérales que pour
prévenir l’immigration irrégulière.
Chaque ambassadeur doit être également un relais actif de nos efforts d’obtention des laissez-passer
consulaires, sans lesquels nous ne pouvons pas reconduire dans leur pays les étrangers en situation
irrégulière. Leur taux de délivrance a baissé de 14 points au cours des 4 dernières années, passant de plus
de 45% en 2005 à 31% en en 2009. L’exercice souverain de notre politique d’entrée et de séjour doit faire
pleinement partie du dialogue entre la France et ses partenaires.
Au moment où notre action de lutte contre l’immigration irrégulière de certains ressortissants
communautaires occupe le devant de l’actualité, je vous demande de faire preuve d’une pédagogie active,
notamment pour ceux d’entre vous qui sont en poste dans les capitales européennes :
Le droit communautaire (directive de 2004) prévoit précisément deux limites à la liberté d’installation des
ressortissants communautaires : le respect de l’ordre public et la nécessité de bénéficier de ressources pour
ne pas représenter une charge excessive pour le pays d’accueil. Ce sont ces dispositions que nous mettons
en oeuvre.
Chaque situation fait l’objet d’un examen individuel sous le contrôle du juge.
Notre politique d’aide au retour volontaire et d’aide à la réinsertion, pouvant aller jusqu’à l’octroi d’un
pécule de 3.600 euros, est un dispositif unique en Europe s’agissant de ressortissants communautaires.
Enfin, et c’est cela le principal, tout Etat membre de l’Union Européenne a la responsabilité de mettre en
oeuvre une politique d’intégration de ses ressortissants. Ce sont les valeurs de l’Europe et les obligations
prévues par les traités.
4. Notre politique de promotion des migrations légales et de solidarité, nous la poursuivons aussi par le
renforcement de l’attractivité de la France et par le développement solidaire, en particulier dans le cadre des
accords de gestion concertée des flux migratoires.
Notre action ne peut être efficace et bien comprise que si elle s’inscrit dans une approche partenariale «
gagnant-gagnant ». J’ai souhaité en ouvrir une nouvelle page à travers des accords « sur-mesure », prenant
en compte les enjeux migratoires dans leur diversité au niveau mondial.
Au cours de l’année écoulée, nous avons signé de nouveaux accords avec :
La Russie, pour développer l’immigration professionnelle hautement qualifiée et les avantages comparatifs
de nos entreprises dans ce grand pays.
Le Brésil, pour renforcer notamment les relations humaines avec la Guyane.
La Serbie, le Monténégro et la Macédoine, pour promouvoir la mobilité des jeunes qui constituent l’avenir
européen des Balkans occidentaux.
Le Liban, pour favoriser la mobilité des jeunes et des professionnels.
Nous poursuivons cette approche à travers le dialogue engagé avec le Qatar, le Vietnam, l’Inde, la Géorgie,
l’Autorité palestinienne, la Bosnie-Herzégovine ou encore l’Albanie.
L’Afrique continue bien sûr de constituer une priorité, tant les destins de la France et de ce continent sont
intimement liés. A l’occasion du récent sommet Afrique-France de Nice, j’ai obtenu des acteurs bancaires
et financiers des engagements sans précédent de réduction des coûts des transferts d’argent des migrants.
Voilà une mesure concrète qui va faciliter la vie des étrangers établis en France et bénéficier au
développement de leurs communautés d’origine. Dans les prochaines semaines, je lancerai avec un
important opérateur la première solution de transfert d’argent par téléphonie mobile.
5. Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, je voudrais terminer mon intervention par la Méditerranée.
Au mois de décembre dernier, j’ai proposé la création d’un Office Méditerranéen de la Jeunesse, chargé de
mettre en oeuvre un projet pilote pour la mobilité des jeunes.
Nous sommes désormais 16 pays du nord et du sud de la Méditerranée (Maroc, Tunisie, Egypte, Liban,
Turquie, Chypre, Grèce, Albanie, Monténégro, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Slovénie, Italie, Malte,
Espagne, France) à être engagés dans cette initiative d’ « Erasmus méditerranéen ».
Dès la rentrée 2011-2012, nous proposerons aux meilleurs étudiants des formations co-diplômantes
dispensées en partenariat par les universités des pays participants :
Des bourses méditerranéennes, un parrainage professionnalisant et l’accès à une plateforme de stages et
d’emplois, en partenariat avec les entreprises.
Des actions de mobilisation de leurs compétences au profit du développement de leur pays d’origine.
Des facilités en matière de visa, de séjour et d’exercice d’une première expérience professionnelle dans le
pays de leur choix, qui constitueront une première étape vers la création d’un espace méditerranéen de libre
circulation du savoir et des compétences.
Nous ferons d’abord cela dans le cadre de six filières d’intérêt méditerranéen, qui correspondent aux
priorités de l’Union pour la Méditerranée :
Dépollution de la Méditerranée.
Autoroutes maritimes et terrestres.
Développement de l’énergie solaire.
Enseignement et recherche.
Protection civile.
Développement des petites et moyennes entreprises.
Je me rendrai la semaine prochaine à Barcelone pour présenter l’Office Méditerranéen de la Jeunesse au
secrétaire général de l’UPM.
Et le 17 septembre, je réunirai les 16 opérateurs nationaux de la mobilité étudiante qui sont parties
prenantes à ce projet. Nous préparerons ensemble le processus de labellisation des masters et des doctorats
co-diplômants qui sera lancé à l’automne.
Un comité d’orientation interministériel, associant les conférences d’universités et des grandes écoles, a été
mis en place. Campus France, dont mon ministère est le deuxième contributeur, juste derrière celui de
l’enseignement supérieur, accompagne mes équipes dans la conduite de ce projet.
Une fois encore, votre engagement sera décisif pour assurer le succès de cette initiative, notamment dans la
constitution de son tour de table financier. Dans les prochaines semaines, je vous ferai parvenir un
argumentaire en vous demandant d’engager des démarches auprès des autorités de votre pays de résidence,
ainsi qu’auprès des entreprises et des établissements d’enseignement supérieur.
Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, voilà beaucoup de chantiers de mobilisation. Je connais les
contraintes qui pèsent aujourd’hui sur notre réseau diplomatique et consulaire. Mais je sais pouvoir compter
sur vous : mieux que d’autres, vous savez combien les enjeux humains sont au coeur de la capacité de la
France à rayonner dans le monde tout en garantissant ses intérêts fondamentaux de souveraineté. Comme je
m’y étais engagé l’année dernière, je continuerai à vous faire parvenir régulièrement des informations
actualisées sur la politique de mon ministère

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