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Jeunesse: Révolution légale ou révolution.....?

par AL de Bx 1 Septembre 2011, 14:46 Social

La Grande-Bretagne a été touchée au début du mois par des émeutes violentes. Alors que le gouvernement voit dans ces troubles des actes criminels, les experts tentent de montrer les causes profondes de ce malaise social, mettant en garde contre une contagion à l’échelle mondial.

 

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Un commissariat de police éventré, un bus impérial réduit à une carcasse fumante, des magasins d’électronique et de sport saccagés, des bâtiments rasés par les flammes... La Grande-Bretagne a été au début du mois le théâtre d’émeutes, ressemblant, dans certains quartiers, à un champ de bataille. Ces affrontements, parmi les plus violents depuis des années dans la capitale britannique, ont été déclenchés par la mort de Mark Duggan, un père de famille de 29 ans, tué par la police dans l’arrondissement multiethnique de Tottenham, à Londres. Les images « écoeurantes » de jeunes encagoulés détruisant des vitrines de magasin avant de repartir avec des écrans plats ou des paires de baskets montrent qu’une partie de la société est « malade », a estimé le Premier ministre britannique David Cameron. Mais il a refusé d’établir un lien entre les émeutes et le dénuement social des Britanniques, ou de voir dans ce déchaînement de violences l’expression d’une révolte politique. Il ne s’agit « pas de politique ni de manifestation, mais de vol », a-t-il tempêté. Une opinion partagée par 42 % des Britanniques, selon un sondage.

 

Toutefois, l’opposition refuse de s’en tenir à des explications simplistes. « Je pense qu’il s’agit de comportements criminels et il n’y a aucune excuse (...).
Mais je sais qu’il faut aller plus loin », a déclaré le leader de l’opposition Ed Miliband. L’opposition a par exemple mis en cause le gouvernement de David Cameron pour son programme de sévères coupes budgétaires dans les dépenses publiques qui auraient alimenté le ressentiment de populations déjà marginalisées. Il ressort d’un sondage que 50 % des personnes interrogées estiment que la moitié de ces coupes budgétaires a bien contribué au déclenchement des émeutes. « Il y a évidemment une dimension criminelle dans ces émeutes, c’est la dimension finale, mais elles révèlent avant tout des logiques sociales, le sentiment d’être exclu et d’être à la marge du système de consommation », explique el-Yamine Soum, sociologue et chercheur à l’École des hautes études en sciences sociales. « Il est évident que le bris de vitrines, l’effraction dans des lieux privés, le vol d’objets à l’intérieur de magasins constituent des faits réprimés par le code pénal, en Grande-Bretagne comme ailleurs. Mais je crois que ceci ne change en rien les causes qui me semblent être d’une autre nature », souligne de son côté Michel Fize, sociologue au CNRS et auteur du livre Les bandes. De “l’entre soi adolescent” à “l’autre-ennemi”. En accompagnant leur mouvement de colère d’un certain nombre d’actions parallèles, « les protestataires ont en fait oublié la nature profonde d’une révolte, qui est une forme de soulèvement populaire, à dominante juvénile ». M. Fize rappelle que la plupart de ces protestataires appartiennent plutôt à la catégorie des moins de 25 ou des moins de 30 ans. « Ils sont majoritairement de condition populaire, et un certain nombred’entre d’eux sont d’origine immigrée. Néanmoins, pour confirmer le caractère juvénile du soulèvement, les procès qui ont lieu actuellement montrent bien qu’on est loin du cliché d’émeute raciale, selon les termes anglais, puisqu’il semblerait même que la majorité des accusés sont des Blancs et non des Noirs. Ce sont des jeunes en grande difficulté économique, soit au chômage, soit à petits revenus », estime M. Fize. Une explication reprise par el- Yamine Soum, qui ajoute qu’en plus des jeunes, il y a également des personnes insérées économiquement, « ce qu’on appelle les “working poor”, ceux qui travaillent mais qui n’arrivent pas forcément à finir leur fin de mois. Paradoxalement, le rôle des gangs a été évoqué mais « il semblerait qu’ils étaient en retrait par rapport aux émeutes, craignant d’être pris la main dans le sac. C’est quand même un phénomène beaucoup plus spontané que ce que pourraient être par exemple des bandes organisées telles que des mafias ou des gangs », indique M. Soum.

 

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Les motivations
Ces jeunes sont donc dans des situations scolaires et professionnelles difficiles. Pour Michel Fize, il y a trois motivations derrière ces émeutes. Tout d’abord, « une dimension conjoncturelle, qui renvoie à l’élément déclencheur de ces événements », est à prendre en compte (en l’occurrence ce jeune père de famille de 29 ans, interpellé et tué dans des circonstances suffisamment obscures). » Le détonateur, comme pour les émeutes françaises de 2005, est toujours le même, c’est un incident avéré ou pas avec la police. La première motivation de ces jeunes a été de vouloir en découdre avec la police et d’établir un rapport de force contre elle, étant – beaucoup de jeunes l’ont dit – humiliés au quotidien, harcelés, interpellés et victimes d’actes racistes. Donc pour le coup, c’est une vengeance collective, évidemment rendue possible par le nombre », explique M. Fize. Deuxièmement, en s’attaquant aux forces de l’ordre, c’est en fait l’État qui est indirectement attaqué. « Derrière ces événements, il y a en outre la dénonciation de la classe politique, incapable de résoudre les problèmes de ces jeunes. Avec tout le discours habituel d’une classe politique loin des réalités sociales, corrompue, dont les liens avec l’argent sont décidément trop étroits, etc. », indique M. Fize Enfin, « c’est une révolte de la colère, de jeunes frustrés d’être sans emploi ou d’être là avec de petits emplois et de petits revenus ne pouvant pas acheter ce que toute cette société d’hyperconsommation offre quotidiennement. Et là il y a un discours, qui est presque même très marxiste, d’un certain nombre de ces jeunes. « En volant, on récupère ces marchandises que finalement les patrons nous volent », poursuit l’expert.


Un message avant tout politique
Ces jeunes apparaissent finalement un peu comme « les porte-parole de toutes ces personnes qui souffrent, quel que soit leur âge, de toutes ces familles qui sont en difficulté. Ces jeunes, malgré eux peut-être, forment une sorte d’avant-garde de la protestation sociale », souligne M. Fize. Certains disent que cette situation ne se prête pas à « parler de soulèvement populaire parce qu’il n’y a pas une conscience politique ». « Il est vrai qu’on n’est pas dans la conscience d’une classe ouvrière meurtrie, comme on l’aurait dit autrefois, mais il y a bien une conscience, au moins pour une partie de ces jeunes (ceux qui sont d’origine immigrée), d’une humiliation raciale au quotidien. La conscience de cette catégorie de personnes qui est soumise à un mauvais traitement de la part de cette société existe donc. Et au-delà, il y a bien la conscience de ce qu’on appelle la jeunesse, principalement des milieux populaires, mais pas exclusivement, qu’il y a bien une situation d’une gravité qui peut justifier que pour se faire entendre, on a besoin de recourir à la violence », insiste le sociologue du CNRS.

 

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Quelle serait la solution ?
Face à ces violences, David Cameron a promis de tout mettre en oeuvre pour ramener l’ordre dans les rues. Il avait notamment annoncé des renforts policiers, portant les effectifs policiers de Londres de 6 000 à 16 000 hommes. Il a en outre demandé une justice rapide pour les personnes arrêtées. Cette réponse policière est légitime du point de vue d’un « État qui doit avoir le monopole de la violence », pour reprendre la définition de Max Weber, indique M. Soum. Toutefois, mobiliser la police avec des méthodes proches de l’armée, des hélicoptères et de grands moyens n’est pas la meilleure solution. Du point de vue de l’État, le mieux c’est d’avoir des unités mobiles, capables de répondre au terrain. Michel Fiz estime de son côté que « la position de M. Cameron – comme celle de Nicolas Sarkozy quand il était ministre de l’Intérieur en 2005 – est d’abord de la communication politique. Il s’agit de ramener l’ordre à la fois en faisant peur et en rassurant l’opinion publique, mais cette politique réussit à rétablir l’ordre provisoirement ». « Il faut une réponse de compréhension pour savoir pourquoi les Britanniques ont dû faire face à ces émeutes et ensuite s’interroger s’il n’y a pas de conséquences liées aux coupes budgétaires sur tout l’aspect social de l’État anglais, qui touche en premier lieu les classes les plus pauvres », indique de son côté M. Soum. Michel Fize suggère quant à lui qu’il serait sage que le gouvernement britannique ouvre une procédure de médiation avec ces jeunes, « cela serait une manière de reconnaître la gravité de leur situation parce que là, on les stigmatise un peu plus, en feignant d’oublier qu’ils ont quand même de bonnes raisons d’être en colère. Il faudrait mettre autour d’une table le gouvernement, la jeunesse, désigner un médiateur (une personne neutre) qui essaierait d’aider les deux parties en conflit à trouver des solutions à leurs problèmes ».


Par ailleurs, « il faudrait mettre en place de grands programmes nationaux (et cela vaut pour
tous les gouvernements du monde) d’insertion économique des jeunes. On a pu dire ici ou là que tout ceci est un problème d’éducation, mais je n’en suis pas certain. On a des systèmes qui fonctionnent pas si mal que ça, mais qui sont complètement décrochés du monde de l’entreprise. Les jeunes, quand ils ont fait des études, ont besoin d’être employés.

 

Le fait est que si on n’arrive pas à résoudre les problèmes d’autonomie de ces jeunes, les raisons qui ont provoqué les colères n’étant pas changées, les événements du début de mois se reproduiront », met en garde Michel Fize.

 

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La ville, un espace de conflits au XXIe siècle
Prévisibles, les derniers événements se reproduiront. « C’est un phénomène classique qui touche et qui touchera de plus en plus les grandes villes parce que ce sont des espaces de ségrégation entre des quartiers riches et des quartiers pauvres. On pouvait s’y attendre d’autant plus que la configuration de Londres est un entrelacement entre les quartiers riches et les quartiers pauvres. La ville sera un espace de conflits au XXIe siècle, ce qu’on observe déjà dans des pays d’Amérique centrale ou d’Amérique du Sud, avec des phénomènes parfois qu’on qualifie de guérilla urbaine », souligne el-Yamine Soum. Une déclaration confirmée par Michel Fize pour qui ce type de violence est tout sauf imprévisible. « La seule inconnue, c’est évidemment la date précise, néanmoins on est presque certain que si les conditions de vie de ces jeunes ne changent pas, au moindre autre détonateur on aura effectivement la même réaction. Cela vaut aussi pour les banlieues françaises. Depuis 2005, rien n’a véritablement changé dans la vie de ces jeunes. On a amélioré un petit peu l’habitat, on a injecté un petit peu d’argent dans ces communes en difficulté, mais pas suffisamment pour résoudre vraiment un problème qui reste d’une très grande gravité. Oui, des émeutes en France peuvent se reproduire s’il y a un incident grave, notamment avec les forces de police. »


Et cela peut se produire un petit peu partout. M. Fize rappelle qu’il y a aujourd’hui un mouvement des indignés en Israël, qu’au Chili des jeunes protestent et revendiquent une éducation gratuite. « On s’aperçoit qu’il y a bien une révolte mondiale de la jeunesse parce que les jeunes où qu’ils se trouvent rencontrent à peu près toujours les mêmes difficultés (soit la difficulté d’accéder à l’éducation, soit, pour la quasi-totalité des jeunes dans le monde, des difficultés pour trouver un travail et donc du chômage massif). Là où c’est particulièrement problématique, c’est que cela concerne aujourd’hui de plus en plus les diplômés. Il n’y a plus que les jeunes non qualifiés qui sont au chômage, mais également des diplômés, voire même des surdiplômés, qui le sont également. Il y a donc actuellement, dans le monde, un problème de la jeunesse », conclut Michel Fize.

 

Vers une révolte mondiale de la jeunesse ?
Source, journal ou site Internet : L’Orient le Jour
Date : 22 août 2011
Auteur : Karine Jammal

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commentaires
D
<br /> <br /> Daniel Thureau <br /> <br /> <br /> Toujours le même problème, à mon avis...Les politiques ne sont<br /> pas capables ou ne veulent pas, pour des raisons idéologiques voir la violence, du moins à ce niveau, comme un langage, ils préfèrent les explications simplistes qu'on rabache chez nous depuis Mai 68, comme tous les langages, quand on ne se fait pas comprendre, on monte d'un cran jusqu'à l'explosion finale....Par exemple sur<br /> Internet, les réseaux sociaux, c'est frappant de voir la violence verbale s'installer dans les débats, les commentaires, on voit des gens qui avaient une certaine retenue quand au vocabulaire<br /> devenir plus violents dans le choix des mots...Personnellement, ça m'a frappé....<br /> <br /> <br /> <br />
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