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Lutte contre la corruption: des progrès mais le bilan reste mitigé, selon la Banque mondiale

par Alain Genestine 16 Juillet 2007, 20:16 International

WASHINGTON (AFP) - La gestion des affaires publiques et la lutte contre la corruption sont en progrès dans de nombreux pays mais le bilan d'ensemble reste mitigé, a estimé mardi la Banque mondiale dans une étude.


Robert Zoellick
 
 
Robert Zoellick, le 13 juin 2007 à Berlin ...





"Nous n'avons pas découvert que dans l'ensemble les indicateurs se sont améliorés significativement", a dit Daniel Kaufmann, co-auteur du rapport sur "les indicateurs de gouvernance dans le monde 1996-2006", lors d'une conférence de presse mardi à Washington.

Pour ce classement, la Banque mondiale a retenu six critères qu'elle a appliqués à 212 pays. Ils se fondent sur plus d'une trentaine de systèmes d'évaluation élaborés par des organismes distincts de la Banque mondiale.

Les critères retenus sont la "voix citoyenne et la responsabilité", la "stabilité politique et l'absence de violence", "l'efficacité des pouvoirs publics", la "qualité de la réglementation", "l'Etat de droit" et "la maîtrise de la corruption".

La Banque s'est gardée de faire un classement général tous critères confondus, ne classant les pays que selon les différents critères, et a souligné mardi qu'elle n'utilisait pas ce classement pour décider d'accorder ou non son aide financière aux pays concernés.

"Nous ne voulons pas tomber dans la futilité d'une course de chevaux", a dit M. Kaufmann qui a effectué cette étude avec les chercheurs Aart Kraay et Massimo Mastruzzi.

Entre 1998 et 2006, des pays comme le Kenya, le Niger et la Sierra Leone ont effectué des progrès dans le domaine de la "voix citoyenne et la responsabilité", l'Algérie, l'Angola et la Libye, le Rwanda et la Sierra Leone dans celui de la "stabilité politique et l'absence de violence" alors que la Tanzanie a amélioré son bilan en matière de lutte contre la corruption, selon la BM.

D'autres pays, comme le Zimbabwe, la Côte d'Ivoire, le Bélarus et le Venezuela ont en revanche vu leur situation se dégrader dans tous les secteurs.

Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, la Finlande arrive en tête devant l'Islande et le Danemark. En queue de peloton se trouvent la Birmanie, la Corée du Nord et la Somalie.

M. Kaufmann a estimé à ce propos que le coût de la corruption dans le monde était estimé à 1.000 milliards de dollars et que celle-ci désavantageait surtout les personnes les plus pauvres de la planète.

Le Danemark, Singapour, l'Islande sont en tête pour l'efficacité des pouvoirs publics alors que les Comores, la Corée du Nord et la Somalie occupent les dernières places.

Quant à la voix citoyenne et la responsabilité, ce sont le Danemark, la Suisse et les Pays-Bas qui forment le trio de tête et la Somalie, la Corée du Nord et la Birmanie, celui de queue.

Pour ce qui concerne la France,
La Banque mondiale tacle la France
A en croire “Doing Business”, un rapport annuel de l’institution internationale, il serait plus facile de faire des affaires en Arménie qu’en France. Vraiment ?



 
Fondé sur une comparaison détaillée des réglementations encadrant la vie des affaires dans 175 pays, ce classement situe la France, puissance du G7, à une piètre place : la 35e. Mais surtout, si l’on en croit Doing Business 2007, il serait plus facile de faire des affaires en Arménie, classée juste devant la France à la 34e place. Qu’il soit plus aisé de monter un business à Erevan qu’à Paris, voilà un sacré « scoop » qu’avance la Banque mondiale. Cette dernière n’en est pas à son coup d’essai. Dans l’édition précédente, Doing Business 2006 avait placé la France à la 44e place entre… Tonga et la Jamaïque. L’Hexagone mis sur le même plan juridique qu’une île des Caraïbes plus connue pour sa violence endémique, qu’un obscur confetti perdu dans le Pacifique ou qu’une ex-République soviétique réputée pour son haut degré de corruption… La très sérieuse Banque mondiale serait-elle tombée sur la tête ?

 

Un tel constat avait déjà mis la communauté française des juristes en émoi l’an dernier. Mais rien n’y a fait, et en récidivant, la Banque mondiale réalimente le soupçon, celui d’un parti pris « anti-français » si ordinaire aux institutions internationales, surtout quand elles sont basées à Washington. L’enjeu dépasse l’outrage d’un orgueil national blessé. Cette « mauvaise réputation » faite à la France pèsera-t-elle dans le choix de localisation des futurs investissements des grandes firmes multinationales ? Marginalement peut-être. Mais l’essentiel est ailleurs. Derrière le discrédit du droit civil et l’apologie de la Common Law, se jouerait, à en croire certains porte-parole tricolores, une bataille mondiale aux conséquences encore plus considérables. Celle que mène le monde anglo-saxon pour imposer, après ses normes comptables et ses règles de gouvernance des sociétés, son cadre juridique.

Une sévère attaque
Le staff de la Banque mondiale se défend de tout a priori et met avant le sérieux de sa démarche, basée sur la comparaison de cas types concrets. Reconnaissant toutefois les limites de ses investigations, uniquement axées sur l’aspect réglementaire en dehors d’autres réalités plus terre à terre (comme les kidnappings d’hommes d’affaires ou la fréquence des escroqueries), il promet d’intégrer l’an prochain d’autres critères tels que la qualité des infrastructures et la transparence des appels d’offres des marchés publics. En attendant, et pour prouver la totale objectivité de ses travaux, la Banque avance le fait que la France figure cette année dans le palmarès des dix « best performers » – c’est-à-dire des pays ayant accompli le plus de progrès pour faciliter la vie des affaires en 2006. Le satisfecit n’en est pas moins assorti des remontrances habituelles, car sur le fond, la Banque mondiale continue de juger sévèrement la France. Si d’indéniables progrès ont été réalisés dans l’Hexagone – pour faciliter la création des entreprises (la loi Dutreil autorise un capital social à 1 euro) –, le cadre réglementaire et législatif français resterait toujours aussi extraordinairement pénalisant et compliqué en matière d’impôts, de taxes et de contrats de travail. Le pire de l’inefficience française selon la Banque ? Les procédures d’enregistrement de la propriété, qui battent tous les records de longueur (183 jours !) pour un coût prohibitif (l’équivalent de près de 7 % de la valeur du bien). Une piètre performance qui place la France pour ce critère au 160e rang du classement mondial. Autant dire parmi les cancres du fond de la classe. Siméon Dgankov, responsable de Doing Business à la Banque mondiale, le confirme au Nouvel Economiste. « Les notaires forment en France un groupe d’intérêt puissant. Or leurs prestations sont onéreuses et font perdre du temps aux hommes d’affaires. Ce serait plus simple d’adopter des formulaires standardisés. Pour faire table rase du passé, les pays en transition ont certes un avantage, car ils peuvent mettre en place des systèmes nouveaux et efficaces. D’où par exemple la bonne situation de l’Arménie, classée au 2e rang mondial pour l’efficacité de ses procédures d’enregistrement de la propriété. Alors qu’en France, les réformes sont difficiles, car elles suscitent de vives résistances de la part des lobbies ou des syndicats. »

La contre-offensive française
Mis en cause frontalement, les notaires se montrent parmi les plus virulents pour mener la contre-attaque. Au lendemain de la publication du rapport, le Conseil supérieur du notariat dénonce dans un communiqué « l’arbitraire de cette étude hautement contestable […], l’imposture de ceux qui veulent donner un caractère universel à de telles données ». « “Doing Business”, c’est le Da Vinci Code du droit », affirme au Nouvel Economiste, Bernard Reynis, vice-président du Conseil supérieur du notariat, en pointant « le manque de rigueur scientifique de la méthode. La Banque mondiale attribue à la France, à tort, des délais exagérément longs pour transférer des titres de propriété incluant le temps de l’enregistrement dans un registre public. Cela témoigne d’une méconnaissance du système, puisqu’en France, le transfert, avec toutes ses conséquences juridiques, est effectif dès la signature de l’acte notarié par le vendeur et l’acheteur. » Ainsi la Banque mondiale aurait trébuché sur sa méthode. « Le droit comparatif est une matière extrêmement complexe tant il est vrai que les pays traînent derrière eux des images toutes faites qui s’auto-entretiennent. Réputée bureaucratique, la France se voit imputer toutes les lourdeurs administratives du monde. Ainsi vu de Washington, pour créer une SARL en France, il fallait passer, jusqu’à encore très récemment, par la case de La Poste pour obtenir une domiciliation », analyse Marc Jobert, avocat. Ce dernier n’hésite pas à relever d’autres bizarreries : « Le bond de la France dans le classement 2007 tient essentiellement à une meilleure note sur les formalités dans l’import-export. Quels sont donc ces mystérieux progrès français, alors que les règles européennes du commerce extérieur s’appliquent uniformément à tous les pays membres de l’Union ? Franchement, je ne vois pas », reprend l’avocat.

Droit civil contre Common Law
Querelle de spécialistes ? Loin d’être des pinaillages d’experts, ces polémiques cachent une controverse plus fondamentale car touchant au rôle et à la place du droit dans le processus économique. « Pour la Banque mondiale, les formes juridiques relevant du droit anglo-saxon sont plus favorables que d’autres à la croissance économique. Cela est très loin d’être prouvé. Nous plaidons pour la diversité juridique », explique Bertrand du Marais, coordinateur du GIP attractivité du droit, un think-tank financé à part égale par les professions juridiques et la puissance publique, qui fait travailler en réseau depuis trois ans une centaine d’expertises sur une évaluation économique du droit en riposte à Doing Business. Dans Les Echos (10/09) Pascal Clément, ministre de la Justice, conteste l’analyse de Doing Business, fondée « sur une philosophie anglo-saxonne purement utilisatrice et simplificatrice du droit ». Et il explicite : « Le problème n’est pas, en effet, de signer un contrat au plus vite et au moindre coût, mais de faire en sorte qu’il soit respecté. Le droit en France est plus précis que le droit dans les pays de la Common Law, ce qui a l’avantage d’éviter, dans la quasi-totalité des cas, un procès. » Un débat un brin académique, mais qui a des conséquences bien concrètes.

Un enjeu aussi financier
« Le droit dans l’économie, c’est comme le système d’exploitation de Microsoft dans l’informatique. Une fois installé, vous le gardez pour toujours, en le mettant à jour par de nouvelles versions », analyse Marc Jobert. L’implantation d’un type de droit ou d’un autre dans les pays émergents devient donc un enjeu majeur. « En cherchant à démontrer la supériorité de la Common Law sur le droit napoléonien, la Banque mondiale donne un coup de pouce aux cabinets anglo-saxons. Qui mieux, par exemple, qu’un grand cabinet new-yorkais maîtrise la loi américaine Chapter Eleven, en passe de devenir la référence dans le droit de la faillite ? », souligne l’avocat. Or il y a à la clé de juteux contrats de prestations. « Tous les appels d’offres internationaux intègrent une matière juridique à hauteur de 1 % du montant du contrat. Plusieurs dizaines de millions de dollars en devises sonnantes et trébuchantes par an à l’échelle de la planète. » Ce serait pourtant dommage que les juristes français baissent les bras. L’adoption, en février dernier, par la Chine d’une loi sur la propriété directement inspirée du droit notorial français est un encouragement.

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