ALTERNATIVE-LIBERALE; Reparlons de libéralisme et de notre projection.

Il faut reconnaître que le terme de libéralisme recouvre plusieurs acceptions qu'on se plaît à distinguer comme à mêler, au gré de stratégies rhétoriques.
On distingue ainsi (ou pas) le libéralisme politique, vertueux et généreux, du libéralisme économique, doctrine du "laisser
faire", qu'il est d'usage de condamner. Selon D. Riot -(voir Agoravox) et on peut le suivre partiellement - les adversaires du libéralisme confondent ensemble conservatisme et
capitalisme avec libéralisme.
On distingue également le libéralisme au sens continental et au sens ''américain''. Dans cette seconde acception, les libéraux sont ceux qui sont favorables à une
société permissive, et de façon général au progrès. Il n'y a guère de doctrine économique déterminée, mais les liberals se reconnaissent davantage que les
conservatives dans le rôle des autorités publiques.
- Une doctrine de la liberté ?
Sans doute le libéralisme, en matière politique ou économique, repose-t-il sur la protection de la liberté par le droit. Mais ce qui le caractérise, c'est avant tout une certaine idée du rapport à l'Etat. L'optique du négatif, en quelque sorte.
L'Etat est nécessaire (quoi qu'il existe des tendances anarchistes dans les galaxies libérales) car il assure la protection des droits (dont le droit de propriété).
Cependant, imposer à l'Etat de réaliser de telles missions suppose de lui conférer des moyens juridiques et techniques à cette mesure. On admet donc que l'état dispose du "monopole de la violence
légitime" (selon les termes de Max Weber). Le problème est que les pouvoirs conférés à l'Etat s'exercent contre les libertés des individus. Autrement dit, l'Etat a pour mission d'assurer
la garantie des droits des individus, mais pour ce faire, il doit porter atteinte à leurs droits et libertés. Il convient donc de protéger les droits de l'individu contre l'arbitraire du
souverain. Le libéralisme est d'abord une doctrine de la méfiance à l'égard de l'Etat. L'action de l'Etat, parce qu'elle suppose de porter atteinte aux droits et
libertés des individus est suspecte.
Mais la méfiance à l'égard de l'Etat n'est pas nécessairement un rejet de principe. Il s'agit avant tout d'établir des garanties contre les pouvoirs de l'Etat. La principale de ces garanties réside dans les droits conférés à l'individu contre l'Etat, et en corollaire, dans la limitation des pouvoirs de l'Etat par le droit ; ce qu'on appelle l'Etat de droit.
C'est ainsi que le droit administratif (et en particulier les règles de police) qui détermine les règles applicables aux pouvoirs publics, repose sur l'idée que les prérogatives de l'Etat doivent lui être conférées (ses compétences sont dites "d'attribution"). L'Etat n'a pas, comme l'individu, la liberté de faire ce qui ne lui est pas défendu. Il doit agir dans les limites strictes de ce qui lui est autorisé par le droit.
Le libéralisme se présente donc comme une doctrine politique ou économique non pas substantielle (quel est le contenu souhaitable de la politique, ou de la
politique économique ?), mais procédurale (quelle est la mesure des pouvoirs de l'Etat ?).
- Un libéralisme économique ?
Cependant, l'idée que l'exercice par l'Etat de ses actions est suspecte a des implications en matière économique. En dehors même de toute idée d'optimalité, le libéralisme
postule que l'intervention de l'Etat dans l'économie porte atteinte aux droits des individus, ne serait-ce que parce qu'elle les prive de biens (du fait des taxes), de libertés (par la
réglementation de certaines activités (comme le travail, le logement ou la consommation). Ces atteintes ne sont pas impossibles, mais elles doivent être justifiées. Et c'est là
que la discussion de nature proprement économique s'engage, car il appartient à l'Etat de montrer que les atteintes à la liberté individuelles sont compensées par un accroissement du bien-être
collectif. Le libéralisme n'est pas à proprement parler une doctrine économique.
Et encore une telle justification ne peut suffire à elle seule, car l'action de l'Etat, reponde-t-elle à l'intérêt collectif, n'assure pas que des droits fondamentaux des
individus n'ont pas été violés. La doctrine libérale ne réprouve pas nécessairement les atteintes aux biens et libertés des individus, mais ces atteintes doivent être mesurées. On peut ainsi
imaginer démontrer que le bien-être collectif (ou "l'intérêt général") est satisfait par l'autorisation faite à l'Etat d'établir des classes d'individus dotés de droits
différentiés ; ainsi d'un droit de vote indexé sur un diplôme, par exemple. Mais on peut avancer qu'une telle mesure porte atteinte à un droit jugé fondamental, comme celui de
participer aux décisions collectives.
- Le débat français
Il nous semble que la question du libéralisme en France est fortement liée au rôle émancipateur que l'on prête à l'Etat (peut-être de façon déraisonnable). Il n'est pas malaisé de montrer (comme A. de Tocqueville s'y était attelé) que le pouvoir royal a favorisé une libération des individus par rapport aux droits féodaux. On peut également juger que ce sont les pouvoirs publics qui ont assuré la garantie des droits des travailleurs ou des consommateurs contre le pouvoir des employeurs et des firmes. La faveur faite à l'Etat dans l'imaginaire collectif (de gauche, mais pas seulement, si l'on en juge par l'état de la pensée gaulliste) a deux effets discutables.
En premier lieu, la seule invocation de "l'intérêt général" suffit bien souvent à justifier sans discussion des atteintes aux intérêts individuels. Lorsque le contenu de l'intérêt général est coloré par la gauche, il a une dimension sociale ; lorsqu'il est coloré par la droite, il présente des aspects sécuritaires. L'un et l'autre ont des racines communes : la méfiance à l'égard de l'individu. On peut estimer ainsi que le libéralisme ne constitue pas une ligne de partage décisive en France entre la gauche et la droite.
En second lieu du Ministre de la Justice, , la protection des droits de l'homme apparaît souvent comme une contrainte malcommode, dont il est possible de faire bon
ménage. Les récentes positionscertains projets du Ministre de l'intérieur, et une certaine évolution du droit pénal français en témoignent aujourd'hui. On peut soutenir qu'une telle situation est
bien peu digne de caractériser le pays des droits de l'homme.
Jacques de Guénin du cercle Frédéric Bastiat.
Oui, le libéralisme est social
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par Jacques de Guenin, le 26/10/05 |
De l'extrême gauche à une grande partie de la droite, les Français se disent "sociaux", et anti-libéraux. Ils veulent dire par là qu'ils s'intéressent au sort des plus défavorisés, alors que nous, les libéraux, qui défendons l'individu et l'économie de marché - rebaptisée loi de la jungle pour la circonstance - sommes des égoïstes, avides de profit. Or il se trouve que c'est exactement le contraire : c'est nous les généreux, et eux les prédateurs! Mais il nous acculent toujours à la défensive en se plaçant sur le terrain de la morale. Il est grand temps de repasser à l'offensive, et d'occuper à notre tour ce terrain.
C'est l'objet de cet exposé. Je vous préviens tout de suite que c'est un exposé de combat, et qu'il a pour ambition de vous donner des armes. Ceux qui n'ont pas envie de se
battre peuvent quitter la salle sans me vexer... Je n'en vois pas, je reprends le fil. Vous pourrez ensuite terrasser votre adversaire tout à loisir avec les armes que je vais maintenant vous donner.
Beaucoup de personnes voient dans le libéralisme seulement une doctrine économique, d'autres y voient aussi une doctrine politique. En réalité le libéralisme est
avant tout une morale individuelle, ensuite une philosophie de la vie en société dérivée de cette morale, enfin seulement, une doctrine économique qui se déduit logiquement de cette
morale et de cette philosophie.
Cette idée est exprimée de façon remarquable par l'article 4 de la fameuse Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui dit : la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui; ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Je vous demande de bien noter au passage que cette fameuse Déclaration est l'œuvre de libéraux. Comme vous le savez, les jacobins, c'est à dire les socialo-communistes de l'époque, se sont assis dessus et ont institué la Terreur. Les concepts de liberté et de responsabilité ne sont pas indépendants l'un de l'autre. Aucun des deux ne peut exister sans l'autre. En effet :
Pour assurer sa vie, l'homme doit produire, au pris d'un effort et en utilisant sa raison, des biens qu'il pourra consommer, stocker, ou échanger, ainsi que des services qu'il pourra échanger contre d'autres biens ou d'autres services. Celui qui n'a pas droit au produit de ses efforts n'a pas la certitude de pouvoir entretenir sa vie de la façon qu'il désire. L'homme qui produit alors que d'autres disposent de ce qu'il produit est un esclave. Celui qui produit alors que l'Etat lui en prend la moitié, est un demi esclave. La propriété acquise par l'effort et la raison est donc une condition impérative de l'exercice de la liberté.
Celui qui produit et échange gagne ce qu'il consomme. Il ne prend rien aux autres. Il ne s'attend pas à être payé sur ses plaintes ou sur l'expression passive de ses
besoins, mais sur ses réalisations, sur ce qu'il a accompli.
L'individu peut obtenir les biens ou les services qu'il ne peut ou ne veut produire lui-même, grâce à l'échange. L'échange se fait avec un autre individu ou avec une
société : par exemple l'échange d'un travail contre un salaire. Lorsque l'échange est libre, les deux parties y trouvent leur satisfaction, sans cela ils ne le feraient pas,
et aucun tiers n'est lésé. L'homme obtiendra des résultats d'autant meilleurs qu'il fera plus d'efforts et utilisera mieux sa raison. C'est la seule source d'inégalité cohérente avec la morale libérale. La morale libérale ne tolère pas l'inégalité devant la loi, quelles qu'en soient ses formes - l'esclavage, les castes, les privilèges - parce que ces inégalités sont obtenues par la coercition exercée par le pouvoir. Il faut que vous vous pénétriez bien de cette vérité historique : en France l'esclavage a été aboli une première fois en 1794 sous la pression inlassable de Condorcet, l'Abbé Grégoire, et La Fayette, qui étaient tous des libéraux. Rétabli par Napoléon, il a de nouveau été aboli en 1848 grâce aux efforts non moins inlassables d'autres libéraux, en l'occurrence Tocqueville, Montalembert, et Victor Schoelcher. Les interactions volontaires avec les autres permettent à l'individu d'améliorer considérablement son efficacité dans sa recherche du bonheur par l'effort et la raison. D'abord, la comparaison de ses résultats avec ceux des autres permet de progresser - à condition que le jugement ne soit pas altéré par l'envie, péché capital pour un chrétien, mais moteur de l'action socialiste. Réciproquement, la recherche individuelle du bonheur par l'effort et la raison engendre des conséquences extrêmement positives pour les autres. S'il jouit de la liberté, l'homme peut créer, inventer de nouvelles voies. Ce faisant, il enrichira aussi les autres. La plupart des gens consomment à peu de choses près l'équivalent de la valeur qu'ils produisent. Mais l'homme qui produit une idée, une invention, ne reçoit qu'une infime partie de la valeur qu'il a ajoutée au patrimoine de l'humanité, et dont un nombre illimité de personnes bénéficiera. Si aucune autorité n'intervient pour lui dicter ses choix, l'homme peut choisir le travail qu'il préfère, se spécialiser dans ce travail, et aller aussi loin dans la voie du succès que sa volonté et son talent le permettent. Mais à une condition : il faut que ce travail ait un intérêt pour d'autres. C'est ce que ne comprennent pas tous ceux qui considèrent que la Société doit leur fournir le genre de travail auquel ils aspirent, même s'il y a déjà beaucoup trop de gens qui font ce travail. Quant à l'entreprise, elle meurt si elle n'est plus durablement en mesure d'assurer à ses clients le service qu'ils désirent. La plus grosse entreprise perd sa puissance et son influence dès qu'elle perd ses clients. Le profit va donc seulement à celui qui a compris ce que veulent les autres. Il n'en est pas de même pour les activités de l'Etat, qui ne connaissent aucune sanction. Les théories de gauche et de la pseudo droite sur l'entreprise, généralement conçues et propagées par des gens qui n'ont jamais mis les pieds dans une entreprise, partent de l'idée qu'il existe une opposition irréductible entre les intérêts des travailleurs et ceux des patrons. Il n'y a rien de plus contraire à la réalité, au moins dans un marché libre. Car dans un marché libre, il n'y a pas de chômage permanent, et les patrons sont en concurrence les uns avec les autres pour attirer les meilleurs salariés. Et même en situation de sous emploi, les patrons conscients, qui pensent d'abord à la pérennité de leur entreprise avant même de penser au profit, savent qu'une entreprise ne peut être efficace que si les travailleurs s'y sentent bien. La préoccupation majeure de tout bon manager, est de faire en sorte que ce soit le cas. C'est très difficile, car chacun de nous croit volontiers que ses mérites ne sont jamais suffisamment reconnus, et les syndicats nous encouragent à le penser. Dans l'entreprise privée, on y parvient pourtant, puisqu'il n'y a que 5% de syndiqués, et il n'est pas rare de voir les syndicalistes eux-mêmes demander discrètement une place dans l'entreprise pour leurs enfants. Bien entendu, il y a des mauvais chefs d'entreprise, mais en moins grand nombre que ne le laisseraient croire le cinéma et la presse - qui sont à 80% au mains des gauchos - et s'il y en a peu, c'est pour une raison bien simple : les mauvais chefs d'entreprise ne survivent pas longtemps. J'ai découvert un jour dans les archives du groupe Peugeot un petit livre datant de 1894 intitulé "Institutions patronales de la maison Les Fils de Peugeot Frères". Ce livre avait donc plus d'un siècle. Il contenait de manière très claire et très lisible les comptes des différentes institutions suivantes :
J'ai vainement cherché dans notre Sécurité Sociale totalitaire s'il existait des avantages que n'avaient pas déjà les salariés de la maison Peugeot. Je n'en ai trouvé aucun. En revanche j'ai trouvé trois avantages qu'avaient sur nous ces salariés il y a plus d'un siècle :
Et ce petit livre se terminait ainsi : "Les ouvriers de la Maison "Les Fils de Peugeot frères" ne se sont jamais mis en grève et une entente parfaite a toujours existé entre les patrons et les ouvriers"
"Un grand nombre de familles sont occupées dans les usines depuis 3 générations" Ce pan d'histoire a été masqué par la propagande gauchiste, ou tourné en dérision sous le vocable de "paternalisme". Je ne peux pas m'étendre aussi longuement sur chacune des conquêtes sociales du libéralisme que je viens de le faire pour celle-ci, car je dépasserais très largement le temps pourtant raisonnable qui m'est imparti. Je me contenterai de les résumer brièvement. Dès 1803, Jean-Baptiste Say déplorait le travail répétitif. Il pensait qu'il fallait donner plus d'initiative aux ouvriers, et se faisait pour cela l'apôtre de l'instruction primaire obligatoire, loi défendue par les libéraux et combattue par les marxistes avec Jules Guesde, qui y voyait une façon pour les capitalistes de se procurer une main d'œuvre plus rentable! La loi du 28 mars 1841 interdisant le travail des enfants de moins de 8 ans et limitant celui des enfants de 8 à 12 ans fut introduite à la Chambre par des libéraux. Le rapporteur était Charles Dupin. Le 17 novembre 1849, à l'Assemblée, Frédéric Bastiat, dans un discours très documenté, et très émouvant, soutint un amendement destiné à autoriser les syndicats ouvriers et la grève, la grève sans violence bien entendu. Il ne fut pas entendu. Il faudra attendre la loi de 1864, pour que soit reconnu le droit de grève. Cette loi a été promulguée par Napoléon III sous l'influence du libéral Emile Ollivier, premier ministre et ministre de la justice. Il faudra attendre vingt ans de plus pour que devienne légale l'existence des syndicats. Une loi avait été déposée en ce sens dès 1876 par le député libéral Edouard Lockroy. Mais elle fut combattue pendant 8 ans par les socialistes. Poussée par le ministre de l'intérieur libéral Waldeck Rousseau, elle devint la loi du 21 mars 1884. Mais quand en 1900 et 1901 Waldeck Rousseau, devenu président du conseil, tenta de l'étendre en accordant la personnalité civile aux unions de syndicats, il se heurta à l'opposition des socialistes.
Le 2 juillet 1906, le député libéral Gaston Doumergue déposa un projet de loi autorisant la création de conventions collectives. Le congrès de la CGT prit parti contre
cette proposition. Ce culte de L'Etat par des gens qui comprennent beaucoup d'intellectuels, c'est à dire des gens qui sont censés observer et réfléchir, a toujours été pour moi une source d'étonnement. Je veux bien qu'il faille une bonne connaissance des mécanismes économiques - qui n'est guère enseignée par l'Education Nationale - pour comprendre tout le mal que fait l'Etat à l'économie. Mais sur le plan social, qui est celui de cet exposé, il n'y a pas besoin d'être très savant pour constater que toutes les horreurs que l'on trouve dans l'actualité et les livres d'histoire sont le fait des Etats : les guerres, les massacres, les déplacements de population, les camps de concentration, les destructions, les enlèvements, les procès truqués, les détentions arbitraires, les tortures, les famines, les persécutions, les confiscations. C'est à chaque siècle et en de multiples endroits que ce culte de l'Etat aboutit aux mêmes dérives abjectes, comme la Terreur en France, le National Socialisme -c'est à dire le nazisme - en Allemagne, ou les exterminations méthodiques opérées au sein de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques. Les libéraux, eux, en sont conscients, et c'est pour cela qu'ils ont toujours cherché à limiter le pouvoir des Etats. Ce sont eux qui ont inventé le principe de séparation des pouvoirs, si difficile à mettre en œuvre, même dans notre vieille démocratie. Ce sont eux qui ont inventé la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 pour protéger les individus contre l'Etat. Mais le libéral est conscient que si l'homme peut acquérir des biens par l'effort et la raison, il peut aussi les acquérir aux dépens des autres par la ruse ou par la force. Le libéral accepte donc comme un moindre mal une autorité dont la seule vocation serait précisément de faire respecter les droits individuels. En pratique cela veut dire un Etat limité aux seules fonctions dites "régaliennes" : la Justice, la Police, et la Défense Nationale, ce qui implique une Diplomatie. Toutes les autres fonctions sont mieux accomplies par la libre association d'individus.
Les deux concepts de la morale socialiste dont on entend le plus parler sont l'égalité et la solidarité. Je voudrais vous montrer à quel point ces idéaux, a priori
édifiants, sont dévoyés par les mécanismes même du socialisme. Le socialiste, lui, recherche l'égalité de résultat, et c'est ainsi que dans ce pays tout est fait pour encourager celui qui ne veut rien faire, et tout est fait pour mettre des bâtons dans les roues à celui qui entreprend. C'est ainsi que l'Education Nationale, n'ayant pas réussi à uniformiser les résultats des élèves par le haut, s'est résigné à les uniformiser par le bas.
Je vous le demande, n'est-il pas profondément injuste de récompenser de la même façon le paresseux et celui qui se donne du mal? Celui qui fait n'importe quoi et celui qui
réfléchit?
"Les sociétés de secours mutuels, [sont une] institution admirable, née des entrailles de l'humanité, longtemps avant le nom même de Socialisme. Il serait
difficile de dire quel est l'inventeur de cette combinaison...Toujours est-il que j'ai vu surgir spontanément des sociétés de secours mutuel, il y a plus de vingt cinq ans parmi les
ouvriers et les artisans les plus dénués, dans les villages les plus pauvres du département des Landes (écrit en 1848). Ce qui a fait jusqu'ici le succès de ces sociétés, - succès lent, à la vérité, comme tout ce qui concerne les masses, - c'est la liberté, et cela s'explique... Leur écueil naturel est dans le déplacement de la Responsabilité. Ce n'est jamais sans créer pour l'avenir de grands dangers et de grandes difficultés, qu'on soustrait l'individu aux conséquences de ses propres actes. Le jour où tous les citoyens diraient : "nous nous cotisons pour venir en aide à ceux qui ne peuvent travailler ou ne trouvent pas d'ouvrage," il serait à craindre qu'on ne vit se développer, à un point dangereux, le penchant naturel de l'homme vers l'inertie, et que bientôt les laborieux ne fussent réduits à être les dupes des paresseux. Les secours mutuels impliquent donc une mutuelle surveillance, sans laquelle le fonds des secours serait bientôt épuisé. Cette surveillance réciproque, qui est pour l'association une garantie d'existence, pour chaque associé une certitude qu'il ne joue pas le rôle de dupe, fait en outre la vraie moralité de l'institution. Grâce à elle, on voit disparaître peu à peu l'ivrognerie et la débauche, car quel droit aurait au secours de la caisse commune un homme à qui l'on pourrait prouver qu'il s'est volontairement attiré la maladie et le chômage, par sa faute, et par suite d'habitudes vicieuses? C'est cette surveillance, qui rétablit la Responsabilité, dont l'association, par elle même, tendait à affaiblir le ressort. Or, pour que cette surveillance ait lieu et porte ses fruits, il faut que les sociétés de secours soient libres, circonscrites, maîtresses de leurs statuts comme de leur fonds. Il faut qu'elles puissent faire plier leurs règlements aux exigences de chaque localité." Voila comment les libéraux conçoivent la solidarité, mais les socialistes baptisent cela "charité", et tournent le concept en dérision comme ils ont tourné le paternalisme en dérision. Pour eux, la solidarité consiste à faire redistribuer par l'Etat de l'argent pris à d'autres. Cela n'a évidemment aucune valeur morale mais donne bonne conscience. Pourquoi venir en aide directement à son prochain, lorsqu'on a déjà payé l'Etat pour le faire? En pratique, l'Etat tue la compassion. Mais cette fausse solidarité permet de faire mousser les hommes au pouvoir. En réalité, elle est devenue au fil des ans une toile d'araignée si complexe que personne ne la maîtrise plus, et elle laisse par conséquent le champ libre à toutes sortes d'iniquités, de gaspillage, et de corruption. Cela est encore plus vrai lorsque cette pseudo solidarité est exercée par des Etats par l'intermédiaire d'autres Etats. Que l'on ait besoin de rappeler de telles évidences en dit long sur le degré de pénétration de la pensée gauchiste. En conclusion, le libéralisme s'intéresse à l'individu plus qu'à la société. Il considère que la société n'est qu'un ensemble d'individus libres et responsables, et que tout ce que chacun de nous fait pour les autres, il le fait librement, soit par raison, soit par inclination. Les socialistes et leurs différents avatars, au contraire, mettent la société au dessus de l'individu. Pour eux, l'individu est une espèce d'animal sacrificiel qui ne compte pas devant la société. Ils la voient comme ayant une vie indépendante des éléments qui la constituent, ces éléments étant eux-mêmes des entités abstraites sans grande importance. Quant aux hommes de pouvoir, tous les hommes de pouvoir, ceux de droite comme ceux de gauche, ils se donnent pour fonction de diriger la société, et toute action individuelle est pour eux potentiellement déviante et donc dangereuse. Mais comme on ne peut convaincre, comme on ne peut diriger, sans un substratum moral minimum, les intellectuels de gauche et les hommes de pouvoir, qui ont les uns et les autres une mentalité de prédateurs, se sont accaparés la morale comme ils accaparent tout le reste. Leur méthode est simple : il leur suffit de faire passer pour égoïste tout individu qui ose penser tout seul, pour exploiteur tout individu qui ose entreprendre, et pour ennemi du peuple tout individu qui met ses intérêts avant ceux de l'Etat. Ils prétendent qu'eux seuls possèdent les vertus d'altruisme et de solidarité. Tant que vous n'aurez pas assimilé cela, vous serez à la merci des intellectuels de gauche, et vous serez à la merci des hommes de pouvoir de toutes tendances. Si nous, les libéraux, nous voulons sortir du ghetto où nous sommes, il nous faut nous battre sur le terrain de la morale, il nous faut récupérer la morale qu'on nous a volée. Les libéraux adorent les raisonnements économiques et dédaignent le combat politique. Mais les raisonnements ennuient la plupart des gens. En revanche beaucoup de gens sont prêts à se battre, voire à mourir, pour des principes moraux. Ces principes sont universels. Ce sont les quatre principes du décalogue relatifs à la vie en société : tu ne tueras point, tu ne voleras point, tu ne mentiras point, tu n'envieras point ce qui appartient à ton prochain, ainsi que le principe ajouté par le nouveau testament : "aimez et respectez votre prochain individu par individu" - je le formule à ma manière, mais j'en respecte le sens. Or le communisme tue, les gouvernements volent et mentent, les socialistes font reposer toute leur action sur l'envie, et tous ces gens confondent l'amour du prochain avec les faveurs accordées à tel ou tel groupe d'électeurs.
J'espère vous avoir démontré que les vrais libéraux, eux, respectent les principes moraux de notre civilisation chrétienne. |